Patrick Gatines -  mars 2009

Analyse en cours d’élaboration et donc inachevée,
Mais très consistante et dont nombre d’éléments m’ont paru essentiels
pour la compréhension de l’ « archipel européen »

Friends of Europe / FoE (Les Amis de l’Europe)

Créé en 1999

Un réseau majeur de l’influence intégrée européenne

Variété : réseau collusif

Site de Friends of Europe

« Un réseau majeur de l’influence intégrée européenne : l’élite de l’influence industrielle, financière, politique (nationale, multilatérale et des institutions européennes) et des réseaux d’influence au sein d’une organisation dirigée par le Président du Bilderberg Group et financée par 40 firmes globales qui en sont membres, dont :  Exxon Mobil, Areva, British Petroleum, British Telecom, Cargill, Coca Cola, IBM, Intel, Microsoft, Pfizer, Shell, Sony,Total,Toyota, Unilever, Véolia, … tous « Amis de l’Europe » !

Ce think tank d’élite, présidé par le président du Groupe de Bilderberg,  profondément interconnecté aux réseaux d’influences majeurs de l’espace européen s’est trouvé très impliqué dans la rédaction du Traité Constitutionnel Européen (Praesidium de la Convention) et dans son processus de relance aboutissant au Traité de Lisbonne (ACED/Groupe Amato). »

Bénéficie du soutien de la Commission Européenne.

1) Les débats et conférences : l’influence par l’échange d’idées et la rencontre de personnalités

a) Les rencontres conviviales
b) Les débats de haut niveau

2) Les publications : l’influence par la diffusion massive des idées, analyses et directives (avec liens vers ces publications)

1) Les principales personnalités–clé de ce directoire

Etienne Davignon
Pascal Lamy + Digression sur le néolibéralisme et le social libéralisme
Le Baron Daniel Janssen
Pat Cox
Peter Mandelson
Javier Solana Madariaga
Erika Mann

2) Des compétences politiques nationales de haut niveau
3) Des compétences politiques dans les institutions européennes
4) Des compétences dans le monde de la grande entreprise globale
5) Des compétences et des rôles décisifs dans les réseaux d’influence
6) Des fonctions marginales dans les organes de presse.

 

Les objectifs de Friends of Europe, selon leur site :

Lors de son cinquième anniversaire en 2004, Friends of Europe définissait ainsi les objectifs qui ont motivé sa création :

« Friends of Europe a été créé en 1999, et nos 5 premières années sont marquées par notre empressement à amener l’approche ‘style estocade’ des think tanks américains sur  la scène traditionnellement plus ‘collet monté’ de Bruxelles.

Notre but est d’amener la discussion des problèmes clés de l’UE en dehors du cercle enchanté de l’élite Bruxelloise en s’associant avec des think tanks majeurs et des media dans les capitales européennes.

La présence à nos événements de plus en plus de jeunes participants des institutions européennes et du journalisme, des affaires et de la société civile, est un résultat encourageant.
Friends of Europe pense que le rôle d’un think tank est d’agir comme un pionnier dans les zones clés de la politique, et donc d’encourager les pensées nouvelles et les idées neuves. Nos rapports sont parfois durs et les analyses vont parfois à l’encontre de l’approche prônée par certains officiels de l’UE et par des groupes industriels. S’appeler Friends of Europe ne veut pas dire être le porte-parole des institutions de l’UE!

Deux problèmes sont un leitmotiv de nos débats et publications: La réforme de la prise de décision au niveau de l’UE et les manières d’améliorer l’information et la communication de l’UE. Ces thèmes sous-tendent un grand nombre de publications révolutionnaires de FoE. »

                                                                                                                                                              Source : site de FoE (2005) - Traduction Stéphane GEZ

Commentaire et décryptage :
 
On remarquera dans cette auto présentation de FoE, la langue de bois habituelle sur la nécessité de développer les think tanks à l’anglo-saxonne en Europe, mais celle-ci, si je puis dire, constitue un modèle du genre caractérisé par :
1) La référence au modèle de think tanks des Etats-Unis, considéré comme toujours comme innovant, modernisateur (« pensées nouvelles et idées neuves », « publications révolutionnaires de FoE ») et impertinent (« style estocade ») par rapport aux institutions européennes closes sur elles-mêmes (« cercle enchanté de l’élite Bruxelloise ») au style « collet monté » qu’il convient alors de réformer. Pour cela FoE s’attache à : « La réforme de la prise de décision au niveau de l’UE et les manières d’améliorer l’information et la communication de l’UE. Ces thèmes sous-tendent un grand nombre de publications révolutionnaires de FoE. »
2) L’inclusion dans une influence en réseau qui associe think tanks et médias (« en s’associant avec des think tanks majeurs et des media dans les capitales européennes »)
3) La revendication d’indépendance (commune à tous les think tanks européens), à la fois avec les institutions et avec le pouvoir économique, (les analyses de FoE «vont parfois à l’encontre de l’approche prônée par certains officiels de l’UE et par des groupes industriels. S’appeler Friends of Europe ne veut pas dire être le porte-parole des institutions de l’UE! »).

Tout cela est bel et bon, mais comment une telle indépendance est-elle possible quand une telle organisation est financée par 40 firmes globales membres et que son directoire (voir plus loin) est composé de personnalités appartenant à l’élite économique, politique et à la haute administration d’organisations multilatérales, dont l’Union européenne, quand ce n’est pas à ses représentants élus (eurodéputés de droite comme de gauche) et que l’on y trouve même le Secrétaire général de la Confédération Européenne des Syndicats, tous acteurs majeurs de la géopolitique européenne et même mondiale pour certains. N’y a-t-il pas là un nouveau genre de « cercle enchanté de l’élite bruxelloise » et même bien au-delà ?
De la sorte, comme c’est souvent le cas avec les réseaux d’influence et autres think tanks, les objectifs et activités véritables de ces organisations d’influence politiques ne peuvent être repérés qu’après étude de leurs activités et de « cas d’école » où ils se sont particulièrement impliqués et après une analyse fine de leur directoire, permettant de dégager la structure de leur champ d’influence et son importance opérationnelle. C’est ce qui est proposé ci-dessous.

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Les activités officielles de Friends of Europe :

Sans conteste, FoE est l’un des think tanks qui est en mesure de développer le plus de moyens afin de faire émerger, d’organiser et de diffuser ses vues en matière de politique européenne. A ces fins, ses activités officielles peuvent être regroupées en deux grandes catégories : des débats et conférences prestigieuses de structures variées, et de nombreuses publications largement diffusées.

1) Les débats et conférences : l’influence par l’échange d’idées et la rencontre de personnalités.

    Ces rencontres s’organisent selon 7 modalités allant des plus conviviales et contradictoires, propices au « style estocade » revendiqué par FoE : les Café Crossfires, les Policymakers’Dinners et les President’s Dinners, aux plus solennelles dans des débats de haut niveau, ce sont les Development Policy Forum, les Atlantic Rendez-vous, les Policy Spotlights et enfin les European Policy Summits.

  Les rencontres conviviales :
 
a) Les « Café Crossfires » : Sortes de « cafés-débats », organisés à la Bibliothèque Solvay (Siège de FoE à Bruxelles). Caractérisés par des échanges d’idées et des débats contradictoires, sur la base d’une discussion lancée par trois à quatre personnes. Permet à une assistance généralement jeune (souvent future élite européenne) d’échanger des idées avec des personnalités européennes et de les rencontrer autour d’un verre dans une ambiance conviviale et détendue organisée par petites tables faisant cercle

b) Les «Policymakers’ Dinners » : Il s’agit là de diners-débats pour ce que FoE nomme des « key stakeholders », ce que l’on pourrait traduire par « personnalités-clé dans leur domaine». On est là dans un cercle un peu plus fermé réunissant 30 de ces personnalités-clé qui selon FoE sont issues du monde l’entreprise, de la Commission européenne et du Parlement, des médias ou de la société civile et qui sont libres d’engager une discussion informelle autour de la table unique. Le cadre plus restreint est alors propice à l’émergence et à l’échange d’idées, beaucoup plus près des rouages du pouvoir et plus centré sur l’analyse opérationnelle.

c) Le « President’s Dinner » : Une fois l’an, le Vicomte Etienne Davignon (Président de FoE) convie à un dîner un aréopage trié sur le volet.
Ainsi et dans ce cadre –selon le site de FoE- a-t-il pu fêter en 2007 ses 75 ans et les 50 du Traité de Rome, dans un élan de modestie.
Ce dîner prestigieux se déroule après le sommet politique européen « European Policy Summit » (organisé par FoE, voir plus bas), lui-même annuel. Le Président’s Dinner clôt donc de façon conviviale cette manifestation elle-même de prestige.

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Les débats de haut niveau :

d) Les « Development Policy Forum » : Il s’agit là de tables rondes dont l’objet est de réfléchir sur les politiques de développement européennes, elles réunissent des personnalités-clé dans leur domaine, des institutions bruxelloises et d’autres horizons géographiques.

e) Les « Atlantic Rendez-vous » : Une série de débats réunissant personnalités-clé européennes et d’outre atlantique pour créer une plate-forme et pour renforcer le dialogue et le débat politique entre l’Union Européenne et les Etats-Unis. Les débats se ventilent selon 6 thèmes : Energie, Innovation, Sécurité commune, Union Européenne/Chine/Etats-Unis, Changement climatique et enfin bio carburants. Chaque débat se concrétise par un rapport où sont émises analyses et recommandations. Les « Atlantic Rendez-vous » représentent donc une préoccupation commune et complémentaire avec le Transatlantic Policy Network qui compte, douze de ses membres au directoire de FoE : neuf députés européens et trois membres de son Conseil d’orientation. [Voir plus bas pour analyse détaillée]

f) Les « Policy Spotlights » : Centrés sur une personnalité  qui vient présenter son programme politique ou son point de vue sur un problème important. C’est par exemple dans ce cadre que Nicolas Sarkozy (le 8 septembre 2006) et François Bayrou (le 8 mars 2007) sont venus présenter  à Friends of Europe leur programme européen alors qu’ils étaient candidats à la présidence de la république française.

Textes de leurs discours : N. Sarkozy     F. Bayrou

Une double visite qui montre combien Friends of Europe est un « lieu » majeur et incontournable de la politique européenne, connu de nos dirigeants et où nos deux candidats avaient des « antennes » dans son staff de direction : Michel Barnier pour Nicolas Sarkozy et Jean Louis Bourlanges qui a soutenu F. Bayrou jusqu’au premier tour de l’élection de 2007, pour rejoindre le candidat Sarkozy au second.
Il faut préciser que bien qu’Elisabeth Guigou et Michel Rocard siègent également parmi les dirigeants de FoE, le Parti Socialiste n’y a pas envoyé sa candidate, ni aucun des deux autres postulants à la candidature (Laurent Fabius ou DSK).

g) Les « European Policy Summits » : Sommet annuel chargé de réfléchir sur les grandes questions du moment relatives à l’Europe et sur les défis majeurs qui l’attendent. Cette conférence annuelle se déroule sur l’ensemble de la journée et sur la base d’un thème générique découpé en différentes problématiques. L’échange est présidé par Etienne Davignon, entouré d’intervenants issus des institutions de l’Union Européenne, de ministres ou de représentants politiques nationaux, des dirigeants de la grande industrie, des médias ou d’ONG. Cette manifestation se clôt en fin de journée par le « Président’s Dinner » (cf. plus haut).

Ainsi s’est déroulé le Jeudi 9 octobre 2008, au Palais d’Egmont à Bruxelles, l’un de ces récents sommets sous le titre :
« L’Etat de l’Europe : créer un sentiment de société ».
L’évènement, précisons-le, était sponsorisé par Veolia Environnement et par Microsoft.
Sur son site, FoE qui donne le programme de la journée, invite à une réflexion divisée en trois sessions,
chacune co-présidée par Etienne Davignon, mais avec une personnalité différente pour chacune d’entre-elle :

Session 1 : Rénover l’image ternie de l’Union Européenne
Cet échange devait être coprésidée par Benita Ferrero-Waldner (Commissaire européenne chargée des relations extérieures et de la politique européenne de voisinage), mais qui, empêchée,  le fût finalement par Giles Merritt (Secrétaire Général de FoE, journaliste au Financial Times et au Herald Tribune).
La réflexion se proposait selon le programme (disponible sur le site de FoE) d’aborder ce sujet selon des angles différents : la ratification du traité de Lisbonne et le déficit d’image de l’Union Européenne auprès des populations, la question des réformes politiques et budgétaires afin de rénover l’image de l’UE ou encore la politique de l’UE face aux pénuries alimentaires dans le monde (rôle de la PAC) et enfin la question de la crise du crédit aux Etats-Unis et de ses conséquences en Europe.
Les intervenants invités y furent Hans-Gert Pöttering (Président du Parlement Européen et membre du Transatlantic Policy Network) et Dimitrij Rupel (Ministre slovène des Affaires étrangères).

Session 2 : L’Europe peut conduire le monde sur le climat et les politiques d’aides ?
Se situant  dans la perspective de la réunion de Copenhague en 2009 sur le changement climatique, et partant du principe que l’Europe est le chef de file reconnu de l’après-Kyoto, la rencontre se proposait de réfléchir sur la mise en œuvre de nouvelles règles en la matière alors même que les Etats de l’UE sont divisés sur la question du nucléaire. Une autre question abordée y a été celle de la nécessité d’une véritable stratégie harmonisée en matière d’aide au développement au niveau européen et au niveau mondial.
A coté d’Etienne Davignon siégeait à ce débat, comme co-président : Jacek Potocnik (Commissaire européen pour la Science et la Recherche). Les allocution programmées y étaient celles de José Manuel Barroso (Président de la Commission Européenne), Joachim Bitterlich ( FoE et Vice Président exécutif de Veolia Environnement / sponsor de l’évènement) et enfin Alain Hubert (Président du conseil d’administration de la Fondation Polaire internationale).

Session 3 : A quoi la société européenne devrait ressembler en 2025 ?
Se situant dans le champ de la prospective, il s’agissait-là d’analyser le devenir des convergences et disparités culturelles des pays-membres que ce soit en matière de santé, d’éducation, d’économie et d’entreprise. En ce sens il était proposé d’interroger l’avenir du « degré d’européanisation » face au vieillissement de la population, de l’augmentation des dépenses de santé, de la pénurie de logement, de main d’œuvre et de la question de la formation professionnelle. Enfin y a été analysé le rôle de l’Etat en matière de responsabilité financière dans le cadre de la régulation des marchés.
Le débat était co-présidé par Giles Merritt (FoE, Financial Times et Herald Tribune) et par John Tornhill (Rédacteur en chef du Financial Times / Edition europe) alors que les allocutions programmées y furent celles d’Odile Quentin ( Direction Générale pour l’Education et la Culture/Commission européenne) et de John Vassallo (Vice-Président des affaires pour l’Union européenne de Microsoft / sponsor de l’évènement).

On me permettra d’interroger quant à la participation de représentants de l’Union en tant que tels à des manifestations sponsorisées par des firmes privées qui s’octroient ainsi « un droit » de parole à leurs côtés. Il s’agit-là d’une pratique coutumière dans les évènements organisés par Friends of Europe. Ce qui précède également illustre aussi parfaitement une remarque critique des écologistes et des Verts en  la matière : les pratiques de lobbying et d’influence avantagent toujours les grandes entreprises privées sur un tel terrain, car elles disposent de moyens considérables, hors de portée des acteurs écologistes. On rappellera que de surcroît Friends of Europe est subventionné par la Commission européenne.

Bref, si l’on considère l’ensemble de ces 7 modalités différentes de débats que sont les Café Crossfires, les Policymakers’Dinners, les President’s Dinners, les Development Policy Forum, les Atlantic Rendez-vous, les Policy Spotlights et enfin les European Policy Summits, on peut considérer que Friends of Europe dispose d’une boîte à outils de premier plan en matière d’influence, d’élaboration d’idées, de brassage d’experts,  mais aussi de rayonnement et d’intégration au processus de réflexion des institutions européennes, au point que souvent on ne peut que s’interroger sur la frontière identitaire qui séparerait cette organisation d’influence de l’Union Européenne elle-même et des grandes entreprises privées.
C’est une des raisons pour lesquelles à mon sens, les Amis de l’Europe méritent d’être qualifiés de réseau d’influence collusif.  

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2) Les publications de Friends of Europe :

Elles sont nombreuses et diversifiées sous trois formes :

Liens avec ces rapports / site de Friends of Europe

Lien avec les Newsletters / site de Friends of Europe

Lien avec « Vu d’Europe » en traduction française

L’ensemble de ces publications assure la diffusion des idées et des dynamiques politiques qui se développent au sein de Friends of Europe, elles ont donc une fonction stratégique déterminante, comme pour tout think tank qui se respecte. Tout en ayant un rôle majeur de vecteur de relations publiques, ces nombreuses publications sont le reflet des aptitudes d’attraction (capacité à attirer les meilleurs experts), d’élaboration (capacité à élaborer des analyses), de rayonnement (capacité à les diffuser dans des milieux variés : entrepreneuriaux, politiques - nationaux et suprananationaux - ou médiatiques) et enfin de réticulation (capacité à s’organiser en réseau afin d’y mener des stratégies intellectuelles et politiques).
On conviendra sans doute en parcourant les différentes publications de FoE qu’il s’agit là d’une organisation d’influence qui excelle non seulement dans ces quatre domaines (par lesquels à mon sens on peut évaluer l’opérationnalité de tout réseau d’influence), mais organisation aussi qui est particulièrement habile à entretenir une synergie particulièrement efficace entre elles, de sorte que chacune se nourrisse l’une l’autre.

Enfin, on remarquera que ces rapports et analyses (reflets des activités et analyses des dirigeants et sympathisants de FoE) abordent des thématiques concernant tous les aspects de la politique européenne selon un consensus idéologique eurolibéral (surtout avant la crise économique de 2008) où les voix discordantes se font rares mais existent (Monica Frassoni et John Monks) par exemple.

On peut sans doute s’interroger sur l’appartenance de la coprésidente du Groupe des Verts au Parlement européen et du Secrétaire Général de La Confédération Européenne des Syndicats (CES) au Bureau des dirigeants de FoE, organisation financée par nombre de firmes globales.  Mais il faut à mon sens se garder de toute réponse simpliste où Verts et CES apparaîtraient comme des « vendus » à la cause eurolibérale, une argumentation ad hoc, courante chez la gauche dite radicale, s’appuyant sur leur approbation indéniable du Traité Constitutionnel Européen puis du Traité de Lisbonne venant en appui de cette thèse.
Certes ce dernier aspect est un élément d’appréciation, mais il n’en est qu’un parmi tant d’autres, il a qui plus est l’inconvénient majeur de ne pas aller plus loin dans la réflexion, tout en n’apprenant pas plus que ce que l’on croit déjà savoir. La réalité me semble un peu plus complexe.

Première question : pourquoi la Co Présidente du groupe des Verts au Parlement européen et le Secrétaire Général de la Confédération Européenne des Syndicats font-ils partiE d’un tel réseau d’influence ? La réponse à mon sens est le d’ordre du choix d’une stratégie politique à la fois de ces deux organisations (à moins qu’elles soient individuelles) et de Friends of Europe.
Pour les Verts et la CES, la question est assez simple : Que vaut-il mieux faire : négliger l’espace politique important que représente FoE ou l’occuper ? Participer en y faisant opposition, en y faisant entendre sa voix divergente et ses exigences ou rester à l’écart et laisser le champ libre à une vision néolibérale de l’Europe tout en se privant d’importantes sources d’informations internes quant à Friends of Europe, « institution » bien connue parmi les dits think tanks et incontournable pour nos dirigeants eux-mêmes (voir plus haut) ? Pour ma part, je pense qu’ils se sont tous deux posés la question en ces termes et qu’ils ont fait le premier choix, celui d’y participer, quand on leur a proposé d’intégrer le bureau des dirigeants de Friends of Europe. Ce choix était-il le bon ? Même si j’ai de sérieux doutes là-dessus, peu importe : je constate qu’ils l’on fait, un point c’est tout.
Quand à la question de savoir s’ils ont ainsi « vendu leur âme à l’eurolibéralisme », précisons par exemple que les Verts ont toujours voté contre toutes les résolutions transatlantiques présentées au Parlement européen ayant pour objectif d’instaurer un marché unique entre l’Union Européenne et les Etats-Unis, même si effectivement ils ont soutenu (en tant que groupe) le Traité constitutionnel Européen puis celui de Lisbonne, donc ce n’est pas si simple.

Deuxième question : Pourquoi Friends of Europe ont-ils sollicité leur participation ? Il s’agit-là d’une tradition chez nombre de think tanks et réseaux de ce genre dont il existe à mon sens deux grandes catégories quant à leur mode de recrutement : ceux qui ont une attractivité fermée, c’est-à-dire qui attirent à eux et pratiquent un recrutement très spécifique de leurs experts et dirigeants, uniquement centré sur une spécificité thématique, qu’elle soit économique (lobbies agricoles, industriels, de services, de branche, de secteur ou de filière économique) ou politique (think tanks de partis politiques ou réseaux associatifs défendant des causes spécifiques : politiques, sociales, humanitaires, écologiques, etc.).
Bref toutes organisations dont on trouvera pratiquement toujours une composition homogène recrutée sur la base de l’acceptation de l’option politique ou de la cause défendue clairement affichée par la structure, pouvant être présenté dans un corpus d’idées communes. Il en va ainsi, de ce point de vue d’une attractivité fermée, pour l’ERT (industriels européens) comme pour Green Peace (ONG écologique), de L’Heritage Found (néoconservateurs US) comme de la Brookings Institution (Démocrates US), de la Fondation Concorde (un des think tank de l’UMP) comme de la fondation Gabriel Péri (think tank du PCF), des Contribuables Associés (ultra droite libérale) comme d’ATTAC (Association militante et think tank altermondialiste). Dans toutes ces organisations les dirigeants, membres des différents conseils qui organisent le fonctionnement partagent tous à l’intérieur de leur structure la défense d’intérêts  économiques et/ou d’options  et de méthodes politiques communes dans lesquelles tous, avec bien sûr des divergences personnelles ou politiques, se reconnaissent – même quand y correspond une impression d’ «auberge espagnole». Mais qu’ apparaissent des divergences sur ces « idées-creuset », une scission sous différentes formes s’amorce alors, comme pour ATTAC en 2008 dont un courant d’abord dissident (Désir d’Avenirs) est alors allé fonder le M’PEP (Mouvement Politique d’Education Populaire). C’est là la rançon à payer pourrait-on dire d’une attractivité fermée : produisant une structure plus homogène autour d’objectifs communs, elle peut nourrir, au fil de l’histoire de la structure, une ou plusieurs scissions qui peuvent mettre en danger l’organisation même quand elle se trouve incapable d’intégrer cette divergence de vues en interne. Un logique d’ailleurs que l’on retrouve fatalement dans l’histoire des partis politiques et des syndicats – et qui est, si je puis me permettre, un des cancers de la gauche.
    
Mais ce n’est pas là le seul cas de figure, d’autres réseaux d’influence, tels Friends of Europe peuvent pratiquer une attractivité ouverte, c'est-à-dire attirer puis intégrer à leur structure et à leurs réflexions des personnalités qui ne partagent pas leurs vues. Quels sont alors les intérêts d’une telle posture ?
Ils sont variables selon les objectifs que se fixent l’organisation et selon ses motifs, par exemple politiques. Si comme pour Policy Network (créé en 2000 à l’initiative de socialistes modérés européens, voir plus bas), l’objectif est de créer un socialisme de « troisième voie » - appelé autrement socialisme libéral - il va sans dire que l’on va attirer à soi et intégrer à la fois des experts et personnalités de sensibilité socialiste modérée mais aussi d’autres de sensibilité plus libérale ou même néolibérale mais elles aussi assez modérées ou encore à géométrie très variable, ainsi par exemple pour prendre des noms connus y trouve-t-on des personnalités comme Tony Blair  et Alain Minc, mais pas Jean-Luc Mélenchon ou Alain Madelin ; on s’en doute, les débats et travaux tourneraient vite cours. On est là donc dans une attractivité ouverte mais potentiellement consensuelle correspondant aux objectifs de l’organisation. Ainsi en est-il d’autres organisations telles que Terra Nova (think tank créé en 2008), inspirée pour beaucoup de Policy Network) mais dont la crise économique actuelle va fatalement l’emmener à revoir la copie originelle.

Historiquement on peut dire que ce type d’approche remonte par exemple au Colloque Lippmann à Paris en 1938 dont l’objectif était de fonder ce que l’on pourrait appeler un « libéralisme de troisième voie », tant le libéralisme dévastateur qui a mené à la crise de 1929 n’était plus tenable et qu’il fallait donc lui trouver une alternative. Pour ce faire donc, 25 personnalités (économistes, intellectuels, politiques) européennes libéraux et socialistes modérés se réunirent autour de Walter Lippmann (USA) et l’on proposa finalement pour désigner cette troisième voie les termes de « libéralisme positif », « libéralisme social » puis de « néo-libéralisme » après avoir écarté celui de « libéralisme de gauche », jugé trop politique. Comme on le voit, cet esprit d’ouverture consensuelle à une longue histoire, elle est même à l’origine du néo-libéralisme. Celui d’alors, tel que dégagé par le Colloque Lippmann, ayant d’ailleurs plus de parenté avec celui accouché par Policy Network (dit aussi Social libéralisme) qu’avec ce que nous nommons néo-libéralisme qu’il serait plus juste d’appeler « ultra-libéralisme », au regard de l’histoire de ces idéologies politiques.
Par ailleurs, on fera remarquer que cette attractivité ouverte de tradition anglo-saxonne, remonte historiquement à la création aux Etats-Unis du Council on Foreign Relations (Conseil en Relations Etrangères, créé en 1921 et qui compte dans ses rangs à la fois des Démocrates et des Républicains), pratiqué aussi afin d’aboutir à une certaine stabilité politique par de-là les alternances, fruits des résultats électoraux faisant se succéder Républicains et Démocrates au pouvoir. Ecoutons sur ce point le Général Pierre-Marie Gallois (proche collaborateur de Charles de Gaulle) lors d’un entretien avec Michael Gama (anthropologue) relatif à ses participations au Bilderberg Group (qui pratique aussi une attractivité ouverte) mais qui intervient dans le passage cité sur le Conseil en Relations Etrangères :

« Général Pierre-Marie Gallois : Mais j’ai connu les Conseils en Relations Etrangères, au moment de cette tournée de 61 (Gallois invité aux Etats-Unis en 1961-ndlr) où j’ai parlé dans au moins une dizaine de Conseils de différentes villes où j’allais… J’ai compris alors comment les Etats-Unis étaient dirigés, et pourquoi il y avait une continuité dans la politique de ce pays, en dépit du mandat présidentiel quadriennal et en dépit de la politique du système des dépouilles*. Le fait que quand on change de parti, démocrate ou républicain, on fout tout le monde à la porte, il devrait y avoir à chaque fois un bouleversement. Non. Pourquoi ? Parce que les Conseils en Relations Etrangères, eux sont constants, et au fond c’est eux qui manipulent par l’argent qu’ils détiennent, les élections. Et c’est eux qui fournissent ces travaux au Département d’Etat. Ce qui remplace chez nous le corps de fonctionnaires qui lui est stable. Chez eux, il n’est pas stable. Donc la stabilité administrative vient au fond, du secteur privé, je dirais. Alors que chez nous, elle vient du secteur public. »

In  Rencontres au sommet  de Michael Gama –Ed.  L’Altiplano -2007- p. 38, 39.
* Le système des dépouilles (spoil system) désigne la pratique aux Etats-Unis selon laquelle, après une élection présidentielle, les collaborateurs du nouveau président sont placés aux différents postes clés de la fonction publique. Le recrutement des fonctionnaires se fait ainsi selon leur appartenance politique. (Note de M.G.)

Outre le fait que cette réflexion-témoignage du Général Gallois confirme l’idée que ce type de réseau joue un grand rôle structurel dans les dispositifs de gouvernance, elle confirme également le poids du secteur privé sur le pouvoir politique par des organisations composées de membres ou sympathisants de deux bords politiques différents, car tel est le cas du Council on Foreign Relations, tel fonctionne la fabrication d’un consensus stable. (voir prochainement sur ce site une étude fleuve sur cet important réseau).     
Certes dans les institutions européennes, on ne « fout pas tout le monde à la porte » mais au niveau de l’exécutif (Commission) et du législatif (Parlement) un renouvellement politique des élites est opéré périodiquement.  De fait aussi on trouve dans nombre de réseaux d’influence tels que Friends of Europe des commissaires (ou ex) et des députés de droite (ALDE et EPP-ED) comme de gauche (PSE - et très rares Verts). Toutes organisations financées aussi largement par les capitaux privés des firmes globales membres. Un cas de figure semblable s’observe au Transatlantic Policy Network (60% de députés européens de Droite et 40% de Gauche) ou au Groupe Kangourou (dans les mêmes proportions).
De la sorte, on ne peut écarter l’idée que se fabrique ainsi dans les institutions européennes un consensus politique stable sur le long terme, par de-là les divergences politiques droite/gauche et leurs concrétisations électorales. On rappellera d’ailleurs que Friends of Europe déclare lui-même sur son site s’inspirer du modèle think tanks des Etats-Unis : « Friends of Europe a été créé en 1999, et nos 5 premières années sont marquées par notre empressement à amener l’approche ‘style estocade’ des think tanks américains sur  la scène traditionnellement plus ‘collet monté’ de Bruxelles. »

Mais l’attractivité ouverte peut ne pas être pratiquée que sur des principes consensuels, elle peut aussi l’être sur des bases plus divergentes dans la volonté de créer une sorte d’opposition interne, ce qui peut être extrêmement fructueux et sur plusieurs points. Ecoutons maintenant Etienne Davignon (Président de Friends of Europe et du Bilderberg Group) s’exprimant sur cette question de l’invitation d’opposants à participer aux travaux du Bilderberg Group : (Propos retranscrits tels que prononcés par Michael Gama, d’où certaines errances de langue)

« A partir du moment où vous déterminez que le plus dangereux, c’est la pensée unique, on va réunir la confrérie qui pense de la même manière et qui est éblouie par son intelligence… Donc on est très attentif au comité de programmes d’être sûr que, bien que nous on pense d’une certaine manière, cela ne veut pas dire que c’est LA pensée et ça vaut la peine d’entendre autre chose et il faut essayer de les convaincre si on croit qu’ils se trompent et que nous on a raison… Donc on fait un effort et on a un élément technique qui nous facilite cela, c’est les invitations. »

In  Rencontres au sommet  de Michael Gama – opus cit. – p155

Jean-Louis Gergorin coutumier du Bilderberg se fait plus audacieux, mais c’est là sans doute son défaut :

« L’essence du système, c’est-à-dire cela fait partie de la fonction assimilatrice du système, c’est que les dissidents sont invités. A mon avis, José Bové sera un jour invité, c’est évident. C’est la nature même du système. » opus cit. p. 156

Quand sur la base d’une autre source Etienne Davignon puis Ernest-Antoine Sellière interviennent, plus modestes, sur ce même point avec l’humour que l’on connaît à ce dernier (il est également Président de Business Europe : Confédération des syndicats patronaux européen, ex UNICE) :

« Bilderberg a préfiguré le mélange qui est aujourd’hui plus répandu, entre les politiques, les entrepreneurs, les universitaires et les journalistes. » souligne Etienne Davignon. Un pilier du club nuance : « On invite des gens de gauche. Sweeney, le président d’AFL-CIO*  est déjà venu. Jospin, Strauss-Khan et Fabius aussi. » Pas de quoi tenir lieu de think tank gauchiste. Sellière lance amusé : « C’est vrai que c’est pas Attac ! »
* Puissant syndicat de salariés des Etats-Unis

Source : Libération, article d’investigation du 05 août 2003 : Dans les coulisses de Bilderberg – Enquête exclusive sur un huit clos où tout peut se dire mais où rien ne doit sortir – Christian Losson, Jean Quatremer et Pascal Riche

On comprend donc, par  le jeu de ces trois citations, combien il est dans la nature de ce type d’organisations d’intégrer des vues divergentes, des oppositions politiques, mais seulement dans une certaine mesure excluant les sensibilités qui s’écartent par trop du centre de gravité du consensus. Quel gain peut alors être obtenu ? Que ce soit pour le réseau d’influence et pour celui qui accepte de l’intégrer.
Pour le réseau d’influence, Etienne Davignon l’explique très bien : il s’agit à la fois de ne pas s’enfermer dans un dispositif de pensée unique, en nourrissant le débat de façon contradictoire, tout en cherchant à convaincre l’opposant intégré aux travaux à intégrer lui-même le consensus de l’organisation.
Autrement dit, il s’agit là d’élargir le consensus en cherchant à assimiler intellectuellement les porteurs de résistances. On le comprend, cette tâche est impossible si on l’entreprend avec des dirigeants d’organisations syndicales et écologiques qualifiées de radicales. De la sorte les qualificatifs « extrémiste » ou « radical » revêtent une signification qui n’est pas seulement discriminante mais excluante, car en fait est jugé ainsi tout ce qui n’est pas assimilable par le consensus. De fait, ces sensibilités politiques là sont excommuniées au sens originel du terme : exclues de la communion-communication parce que non seulement elles s’écartent trop du consensus mais aussi parce qu’elles sont radicales au sens étymologique du terme : elles pensent le problème à la racine, pour prendre les exemples d’ATTAC (sur la financiarisation de l’économie, sur le partage des richesses et sur la nécessité d’une économie écologique et sociale) et de José Bové (sur les mêmes points mais aussi sur les délires de l’agriculture productiviste et des firmes qui la dirigent).
Quand à savoir si un jour Bové sera invité par le Bilderberg Group, l’examen des listes des invités sur les dix dernières années montre que l’on en est très loin, de plus, si tel devait être le cas, il m’étonnerait beaucoup qu’il accepte car c’est un homme qui a une éthique politique (indépendamment de ce que l’on peut éventuellement lui reprocher). Une éthique qui a mon sens, et entre autre, lui interdit de participer à des sommets off record et où il n’aurait pas le droit de relater ce qui s’y est dit ; mais l’éthique est sans doute quelque chose qui échappe à Jean-Louis Gergorin.    
Il est donc assez clair que dans les faits, ce ne sont que des oppositions jugées (à tort ou à raison) assimilables qui peuvent intégrer les travaux et les réseaux d’influence, une pratique où la structure d’accueil va pouvoir trouver aussi et peut-être même surtout une image d’ouverture, même si elle ne se traduit pas dans les faits, je veux dire sur le plan de l’assimilation des idées, de fait alors cette opposition intégrée devient une sorte de « faire-valoir » afin de pouvoir échapper aux accusations de réunion élitiste et de cercle fermé.
Ainsi pour Friends of Europe, la présence de Monica Frassoni (Les Verts) et de John Monks (CES) peut-elle être présentée par nos Amis de l’Europe comme gage d’ouverture et de diversité et donc venir contrecarrer toute accusation de cercle enchanté des élites reposant sur un consensus social libéral. De la sorte une telle structure d’influence y trouve-t-elle une sorte de caution d’ouverture, de la sorte aussi les  personnalités voire les organisations dissidentes y acceptent-elles de jouer le rôle de faire-valoir. C’est le prix à payer pour tenter d’y «secouer le marronnier» (voir site de FoE) et pour être tenu informé de l’intérieur des activités de l’organisation d’influence, un dernier jeu dont la dite organisation n’est sans doute pas dupe, si bien que son rendement doit être vraisemblablement très relatif quand aux informations stratégiques concernant le dit réseau d’influence, ici FoE.
Par ailleurs cet exemple illustre aussi combien un réseaux d’influence ne sauraient être considéré comme un milieu homogène mais comme un milieu socio-anthropologique et politique soumis à des stratégies internes qu’elles soient individuelles ou collectives et qui contribuent à les constituer comme des espaces politiques complexes et non pas homogènes comme le prétendent les conspirationnistes.

Enfin, je préciserais tout de même que si Monica Frassoni n’est présente à ma connaissance que dans Friends of Europe, John Monks lui est également gouverneur de la Fondation Ditchley, membre des conseils consultatifs / d’orientation de l’European Policy Centre et du Centre for European Reform et qu’il était encore en 2007 vice-Président du Mouvement Européen International et que dans les directoires de ces réseaux il côtoie encore nombre de membres de celui de Friends of Europe.   

On conclura sur cette partie en précisant que par la pluralité et la diversité des conférences et débats qu’ils organisent et par la richesse de leurs publications de haut-niveau où s’exprime des acteurs majeurs de l’élite et des institutions européennes, toutes manifestations et productions sponsorisées par des firmes privées, Friends of Europe / Les Amis de l’Europe se présente comme l’un des réseaux d’influence / think tank de premier plan au niveau européen, et ce dans le cadre d’une influence de type intégrée, c'est-à-dire ou d’ores et déjà la lisibilité des frontières qui sépareraient Institutions européennes, entreprises privées et think tank deviennent des plus évanescentes.

Une impression que ne fera que conforter l’analyse fine du Directoire de cette organisation qui d’ores et déjà se place au plus haut niveau en matière d’attraction (des meilleurs experts et décideurs privés et publics), en matière d’élaboration (d’analyses relativement à toutes les questions les plus stratégiques auxquelles est confrontée l’UE)  et en matière de rayonnement sous forme de  café-débats, de dîners, de conférences et « sommets » prestigieux mais aussi de publications périodiques nombreuses, régulières, diversifiées et largement diffusées.
Reste donc la réticularité (capacité à s’organiser en réseaux stratégiques). Il s’agit là de ce qui suit.         

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Le directoire de Friends of Europe : une élite internationale où tous les pouvoirs sont confondus
Du « cercle enchanté » au manège enchanté des chaises musicales

Lien avec la liste du Directoire

Sans plus tarder je propose une analyse détaillée de ce directoire sur la base de la liste présentée par leur site en 2006, liste à partir de laquelle j’ai notifié les quelques départs et nouvelles arrivées de membres à son directoire apparues depuis, et qui donc se trouve actualisée jusqu’en 2008.
Je présente donc ci-dessous un document qui m’a demandé « un certain temps » de réalisation, fruit de plusieurs mois de recherche, puisqu’il recense les différentes fonctions et appartenances de chacun des dirigeants de FoE (de 2006 à 2008).  Ce directoire se ventile actuellement somme suit : 1 président / 1 praesidium de 6 membres / et 44 administrateurs (trustees) ; suivront la synthèse et l’analyse de ce directoire qui m’ont permis de réaliser un graphe du réseau stratégique de Friends of Europe.

Ce genre de repérage et d’analyse de position systématique contribue largement à la réalisation des graphes des réseaux stratégiques des organisations d’influence et donc à leur donner un caractère solide et objectif.

Dans le tableau qui suit, j’emploie mon repérage colorié habituel pour distinguer les différents niveaux géopolitiques d’implication : fonctions politiques nationales, fonctions au sein d’organisations multilatérales, avec mise en valeur de l’Union Européenne, fonctions dans les firmes globales, fonctions dans les réseaux d’influence, fonctions dans les médias, fonctions dans les syndicats.

Analyse de position du Directoire de Friends of Europe

Abréviations :
Prés. : Président, V. Prés : Vice président, Dir. gén. : Directeur Général, Secr. gén. : Secrétaire général. Ad. : Administrateur, Gouv. : Gouverneur.  Mbr. : Membre. Amb : Ambassadeur
1er Min. : 1er Ministre, Min. : Ministre, Fin. : Finances, Eco. : Economie, Aff.étrg. : Affaires étrangères, Agr : Agriculture. Cons. d’ad. ou C.A., de surv. : Conseil d’administration ou de surveillance.
Com. europ. : Commission européenne. Dir. Gén : Directeur Général, Parl. europ. :Parlement européen, Prés Com. : Président Commission parlementaire (européenne)
Dép. UE : Député européen.
Partis politiques européens : PSE : Parti Socialiste Européen, EPP- ED : Parti populaire et démocrate européen et démocrate européen, droite européenne comme ALDE : Parti Libéral et Démocrate Européen.
 
Sigles des réseaux d’influence : TPN : Indique l’appartenance au Transatlantic Policy Network, ERT: European Round Table, CEPS: Centre for European Policy Studies,
EPC: European Policy Centre, ACED: Action Committee for European Democracy. ECFR : European Council on Foreign Relations. Les autres sont en toutes lettres.

Nota : Il s’agit là de tous milieux extrêmement changeants, il se peut donc, malgré mes efforts, que quelques erreurs d’actualisation s’y soient glissées, le mouvement des « portes à tambour » et des « chaises musicales » n’y sont pas toujours faciles à suivre.
La date de référence pour le tableau qui suit est je le répète, celle d’avant janvier 2007, tout ajout est précisé. 

((G.L.)) : Lien avec fiche biographique beaucoup plus détaillée dans l’espace « Global Leaders »


President

Vicomte Etienne DAVIGNON         ((G. L.))
Prés. Bilderberg group,
ex Vice Prés. Com.Europ. Indus, recherche et énergie
Co fondateur  et  Prés. ERT, ex Prés. AUME, membre du conseil de l’ECFR et beaucoup plus…
Prés Société Générale de Belgique et Union Minière, V. prés. Accor, Tractebel & Fortis Blg, Administrateur de 14 firmes dont Kissinger assiociates,
Ex mbr. Cs de surv. Carlyle Group

 

 

Praesidium   (6 membres)

Pat COX
Prés. parl. europ. 2002/2004
Président du Mouvement Européen depuis 2006
Mbre du CA d’International Crisis Group
Mbre du comité d’honneur de l’Institute of European Affairs
Ad. Michelin

 

 

 

Jean-Luc DEHAENE       ((G. L.))
V. Prés Convention européenne
Mbr du Groupe Amato (ACED) et du conseil de l’ECFR
Président du Collège de l’Europe
Vice Prés. de Madariaga Foundation
Sénateur et ex 1er Min. belge
Ad. Interbrew, Corona-Lotus, Umicore, Telindus, Domo, Seghers, Better Technology group.
(Nouveau Président de Dexia, depuis oct. 2008)

 

 

Baron Daniel JANSSEN
Mbr. Du comité exécutif de la Trilatéral Commission.
&  ex dirigeant de l’ERT
Mbre Cs d’ad. de Madariaga found.
Conseil de surv. Bilderberg group
Ex mbr. Comité Européen pour la recherche et le développement de la CEE
Prés. Solvay
V. Prés. UCB
Ad. Schroders London et Fortis
Ex Ad. Générale de Banque,  et conseil consult. Ford Company
Prés. honoraire de la Féd. des entreprises de Belgique

Pascal LAMY            ((G. L.))
Dir Gen OMC
Ex Dir. Gén du Crédit Lyonnais
Ex mbre. du comité directeur du Parti Socialiste Français
Ex Com Europ Commerce International
Mbr. Conseil ECFR (European Council on Foreign Relations)
Mbr. Ca En Temps Réel
et Centre for European Reform
Président d’honneur de l’IRIS (Institut de Relations Internationales et Stratégiques) et de Notre Europe
Part. rég. Bilderberg group
Ex mbre du Mouvement Européen et RAND Corporation

António VITORINO        ((G. L.))
V. Prés European Policy Centre
Mbre conseil ECFR
 Administrateur du Centre for European Reform
EX Com. Europ Justice, affaires intérieures
Mbr. Du praesidium de la Convention pour le futur de l’Europe
Mbr du
Groupe Amato (ACED)
Ex V. Prés. Portugal Telecom International et ex Prés de l’ AG des actionnaires de la Banco Santander Central

Guy VERHOFSTADT (depuis 2008)
Ex 1er Ministre de Belgique (1999-2008)
Ex candidat à la présidence de la Commission européenne en 2004
Auteur de nombreux ouvrages dont :
« Les Etats-Unis d’Europe »

 

 

Trustees (50 administrateurs)

Miguel Angel AGUILAR (a quitté FoE en 2007)
Journaliste à El País (correspondant Europe)

 

Edmond ALPHANDERY
Mbre du Comité exécutif de la Trilateral Commission
Prés Cs Surv CNP assurance.
Prés. conseil  consultatif économique RWE
Ministre éco Fr.  93/95

Giuliano AMATO        ((G. L.))
Gouverneur Ditchley Found.
Mbre du Cs d’ad. du Centre for European Reform
Mbr. Aspen Italie
Mbr. Conseil ECFR
Co fondateur de Policy Network en 2000
Part RU Trilatéral Commission
Ex 1er Ministre It.
V. Prés Convention  Européenne
Président du Groupe Amato (ACED)

Michel BARNIER
Mbr. Cs. D’orientation d’Aspen France
Mbr CA de l’IRIS /Institut des Relations Internat et Stratégiques
Mbr. Nouvelle République, Dialogue Initiative et Cercle de Lorraine
Ex Ministre Aff. Etrg.                                      
Com. Europ Réformes institut. & règlem.
Mbr. Du praesidium de la Convention  européenne

Mbr du Groupe Amato (ACED)
Conseiller de Nicolas Sarkozy, puis son Min. Agr (2007)

Enrique BARON CRESPO
Membre du Transatlantic Policy Network
Ex European Policy Centre       
Député UE, (PSE)
Ex Président du  Parlement Européen (89/92)

Un des trois députés représentants le Parlement européen  à la Conférence Inter Gouvernementale de Lisbonne en 2007                

Carl BILDT                                  
Membre du Conseil Consultatif du TPN
Mbre de la Trilateral Commission
Mbr. Cons. Consult. Council on Foreign Relations (CFR)
Ad. RAND Europe et Centre for European Reform
1er Ministre Suède 91/94
Envoyé spécial du secrétariat de l’ONU pour les Balkans

Joachim BITTERLICH
Ex conseiller d’Helmut Kolh (politique étrg. et sécurité)
Ex ambassadeur de l’Allemagne
à l’ OTAN
Vice Prés.  VEOLIA Environnement.

Jean-Louis BOURLANGES
Mbre  de la Trilateral Commission
Membre du Transatlantic Policy Network (jusqu’en 2007)
Ex European Policy Centre
Mbre. CA de Notre Europe
Dép UE  (EPP-ED), jusqu’en  décembre 2007
Ex Membre commission commerce internat

Membre de la Cour des Comptes (France)              

Laurens Jan BRINKHORST
Ex European Policy Centre
Ministre des affaires économiques (Pays-bas)
Président du Conseil Compétitivité de l’UE (Marché intérieur, Industrie et Recherche)

Elmar BROK                          
Vice Président-UE  du Transatlantic Policy Network
Ex European Policy centre
Député UE (EPP-ED)
ex Prés Com Aff Etrg,
V. Prés du Transatlantic Legislators Dialogue, jusqu’en 2007

Un des trois  députés représentants le Parlement européen  à la Conférence Inter Gouvernementale de Lisbonne en 2007                                 

John BRUTON
Ex Mbre  de la Trilateral Commission
Gouverneur Ditchley Found
Mbr. Conseil ECFR
Mbr. Du praesidium de la Convention pour le futur de l’Europe
Chef Délégu Com UE Washington DC

1er Ministre Irl 94/ 97

Günter BURGHARDT
Membre du Conseil Consultatif du TPN             
Ex chef délég Com europ
Washington DC

Ad. Transatlantic Policy Network

Paolo CECCHINI (a quitté FoE en 2007)

Ex Dir marché intérieur Com europ

 Henning CHRISTOPHERSEN
Ex European Policy Centre
Mbr. Du praesidium de la Convention pour le futur de l’Europe
V. Prés Com Europ(85/95)

ex 1er min &  Aff étrg puis des Finances DK

Robert COX
Ex conseiller d’ EC

Loyola de PALACIO (a quitté FoE en 2006)
 
Part Davos 2001 et Cercle de Lorraine
Ex V Prés Com. Europ,
Prés Com. Aff étrg du Parti Populaire Esp.

Baron Philippe de SCHOUTHEETE de TERVARENT
Ad. European Policy Centre , CEPS et Notre Europe
Directeur du département Europe de l’IRRI
(Royal Institute for International Relations)
Part. régulier Bilderberg group
Ex représentant permanent de la Belgique à l’UE
Ad Société Belge des Bétons
Ex ad. Générale de Banque

Yves-Thibault de SILGUY
Président de VINCI
Ex V Prés SUEZ (E. Davignon conseil de surveillance et administrateur) et ex Prés. MEDEL
Ex Ad UGINE & UNIMETAL

Anna DIAMANTOPOULOU
Députée  grecque.
Ex Co europ Emploi &aff sociales
Ex Prés. EOMMEX (Org. patronale PMI/PME)

Uffe ELLEMANN-JENSEN
Mbre CA de l’Inernational Crisis Group
Mbr. Conseil ECFR
Prés Baltic Dev. Forum,
Ex Prés. Parti Libéral Europe (1995/2000)
V. Prés de l’Internationale Libérale
Prés de Royal Greenland et Bankinvest
V. Prés Foss, Elleman-Jensen
Ad. Estonian Air
Ad. de plusieurs filiales de AP Möller
(pétrole, gaz, armement)
ex Min aff étrg. Danemark

Franz FISCHLER
Ex Co Europ Agr pêche

Monica FRASSONI
Co-Prés Groupe desVerts, Parl Europ

Catherine GERNAY
V Prés Belgian business Council Sustainable Dev
Ex assistante d’E. Davignon à l’ERT

Elizabeth GUIGOU
Mbre  de la Trilateral Commission
Prés-fondatrice Europartenaire, Cs Ad. Notre Europe
Ex European Policy Centre
Ex Ministre Justice (Fr.)
V Prés déléguée Assemblée nat./UE

 

Toomas Hendrik ILVES
Ex Mbre  de la Trilateral Commission           
Membre du Transatlantic Policy Network (PSE)
Dép europ. (PSE)
Ex V. Prés Co Aff Etrg (2004-2007)
Président de la République d’Estonie

Sandra KALNIETE
Co Europ  Agr Pêche
Mbr du Groupe Amato (ACED)

Wim KOK
1er Ministre (Pays bas 94/02)
Mbr du Groupe Amato (ACED)
Mbre CA d’International Crisis Group
Part rég. Bilderberg Group
Prés High level working group on Lisbon Strategy
 

Horst Günter KRENZLER
Dir gén Rel Ext Co Europ

Vytautas LANDSBERGIS
Dép Europ Mbr Co Aff Etrg, ex Prés. de Lithuanie

Spiro LATSIS
Prés EFG Eurobank

Philippe LEMAITRE (a quitté FoE en 2007)
Journaliste : Le Monde, Correspondant à Bruxelles
et à l’OTAN pendant 35 ans

Ex European Policy centre

Bruno LIEBHABERG (a quitté FoE en 2007)
Manadg. Dir Business Environnement Europe,
ex membre cabinet J. Delors

Erkki LIIKANEN
Mbre  de la Trilateral Commission                        
Membre du Conseil Consultatif du TPN
Ad. European Policy Centre
Part. rég. Bilderberg Group
Gouv Banque de Finlande
Ex Com. Europ Industrie(Santer & Prodi)
Prés Conseil de surv. Outokumpu Inc.
Ex Ad. Televa Oy (NTIC)

Robert MANCHIN
Prés Gallup Europe

Peter MANDELSON
Co Europ Commerce internat,
Gouv. Ditchley Found
Prés. honoraire de Policy Network
Mbre cs d’orientation A Gauche, en Europe
Mbre  de la Trilateral Commission
Part rég. Bilderberg Group
Ex conseiller puis Ministre de Tony Blair (Commerce et industrie)
Nota : a démissionné de la Commission en oct. 2008
Pour devenir Ministre du Commerce de Gordon Brown

Erika MANN                
Présidente du Cs d’Ad. Europe du Transatlantic Policy Network
Dép UE (PSE)                          
Cs Ad EPC
Eurodéputée mbre du Bureau du Kangaroo Group

Stefano MICOSSI
Ad du CEPS
Dir gén ASSONIME
Ex Dir gén Indus Co Europ

John MONKS
Secr Gén Conf Europ Syndicats (CSE)
Gouverneur Ditchley Found,
Cs d’Ad. EPC, Centre for European Reform et Monvement européen

Mario  MONTI           ((G. L.))
Ex Co Europ Compétitivité (Santer & Prodi)
Mbre  de la Trilateral Commission
Membre honoraire Kangaroo group
Ex cons surv. Bilderberg group, Trilateral Commission & Aspen Italie
Prés BRUEGEL (Brussel European & Global Economic Laboratory)

Ex Ad. FIAT et IBM Italia

Riccardo PERISSICH
Dir Aff Etrg à Telecom Italia
Ex Dir Gén Indus Co Europ

Alojz PETERLE  
Dép UE Mbr Co Aff Etrg
Membre invité au Praesidium de la Convention

Paul REVAY
Dir Europ Trilateral Commission

Eberhard RHEIN
Dir Commerce méditerranéen Com. Europ.

Keith RICHARDSON
 Ex Secr Gén. ERT

Michel ROCARD                    
Membre du Transatlantic Policy Network
Président du Conseil d’orientation scientifique de
Terra Nova
Membre du Cs. D’ad. de Confrontation Europe
Conseiller de l’International Crisis Group
Dép Europ, (PSE)
 Ex mbr Co Aff Etrg  
Ex 1er Ministre France
Ex ad. IRIS

Jacek SARYUSZ-WOLSKI
Dép Europ. (EPP-ED) 
A intégré le TPN en 2007
Ex V. Prés. Parl Europ
Co Chairmen Transatlantic Législators’ Dialogue 

ex Min. Aff. europ. Pologne

Eduardo SERRA (a quitté FoE en 2007)
Ex Min. Défense Espagne

Javier SOLANA
Prés. de Madariaga Found, Co fondatrice de New Eurasia Foundation en 2004
Mbre du Cs. D’orientation scientifique de Terra Nova
Part rég. Bilderberg Group.
Ex Secr Gén de l’OTAN
Secr. Gén. de l’UEO (Union de l’Europe occidentale)
Chef de l’AED (Agence Européenne de Défense)
Ex Min Aff. Etrg. d’Espagne
Secrétaire général du conseil de l’Union Européenne
Haut responsable de la Politique Etrangère de Sécurité Commune depuis 1999

Dirk STERCKX           
Membre du Transatlantic Policy Network
Dép UE. (ALDE)
Ex mbre Co Transports/tourisme

 

 

 

 

Karel VAN MIERT                 ((G. L.))
V. Prés European Policy Centre
Mbre Cs d’Ad de Notre Europe
Ex Prés de l’ Université de Nyenrode
Membre honoraire Kangaroo group
Ex Prés du Parti Socialiste Belge
Ex Vice prés. Commission Europ en charge de la compétitivité
Ad. AGFA Gevaert & De Persgroep
Cons de surv. Philips, Walters Kluwer, Goldman Sachs, Rabobank, DHV, Guidant, Eli Lilly, British American Tabacco
Conseil  consultatif  international de RWE

Frans VAN DAELE  (depuis 2008)
Ambassadeur de la Belgique aux Etats-Unis
Représentant permanent de la Belgique à l’OTAN

Team (à actualiser)

Giles MERRITT
Journaliste Financial Times & International Herald Tribune
Fondateur de Forum Europe (1989)

Geert CAMI

Nathalie FURRER

Catherine GERNAY
Secr Gen   Fabrimetal/AGORIA
Ex Assistante d’E. Davignon à l’
ERT

Philippe LEMAITRE  Journaliste Le Monde
                                           (voir plus haut)

Dominique OSTYN

Keith RICHARDSON
Ex secr. gén. ERT

Caroline BERGAUD

Síona BREATHNACH

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Synthèse et analyse :
Remarques d’ensemble : FoE, think tank, think network et influence intégrée

En première analyse, on ne peut que remarquer combien Friends of Europe mérite d’être qualifié de think tank d’élite. En effet les membres de son directoire représentent un aréopage (de 56 membres jusqu’en 2007 et de 51 en 2008) où se retrouvent dirigeants et personnalités de première importance dans la géopolitique européenne : Dirigeants (ou ex) d’exécutifs d’Etats membres de l’UE, d’organisations multilatérales (Union Européenne et Organisation Mondiale du Commerce), dirigeants ou représentants de la grande entreprise et des firmes globales, mais aussi du monde des réseaux d’influence. De surcroît, on y trouve aussi quelques journalistes d’organes de presse prestigieux et en sus le dirigeant de la Confédération Européenne des Syndicats. D’où :
 
Questions liminaires ouvrant à réflexion :

A qui tous ces représentants-là – et notamment les représentants élus – rendent-ils compte aux citoyens de leurs activités au sein de FoE, véritable organisation multilatérale discrète où tous les pouvoirs sont confondus et exercés très souvent de façon furtive ? C’est-à-dire sans produire l’information de leur propre existance, sinon pour les « initiés », ou qui croient l’être ; tant je me demande de plus en plus si tous les membres de tels directoires sont véritablement conscients de la portée et du sens des stratégies mis en œuvre dans des réseaux tels que Friends of Europe. L’illusion de la maîtrise n’est pas seulement la maladie des conspirationnistes, elle est aussi celle des dirigeants – des dits « responsables » ; elle ne doit pas être celle d’une introspection à volonté intellectuelle ou scientifique.
Et je tiens l’actuel enlisement du processus de ratification des traités institutionnels et politiques européens (tout comme l’actuelle crise économique) comme particulièrement caractéristiques de cette illusion de la maîtrise mise en œuvre par ces élites, pour qui le peuple souverain persiste à être et à devenir de plus en plus LE problème majeur. Et c’est alors la Démocratie, en tant que régime politique, qui devient leur problème majeur et les modalités qu’ils inventent pour y remédier qui deviennent autant d’éléments empiriques de construction d’un régime politique d’une nouvelle nature où le peuple, marginalisé et défait de sa souveraine puissance ne peut plus jouer son rôle de Demos cratos, relégué et instrumentalisé maintenant dans sa position de « peuple-problème » : de Demos problêma.

Il est alors clair que par ce changement de paradigme et dans le nouveau genre de régime politique qu’il inaugure, ceux qui peuvent contrôler (ou le pensent) la « manipulation consciente des opinions », pour reprendre l’expression d’Edward Bernays, vont constituer un niveau d’organisation politique de premier plan dans le cadre d’un système géopolitique globalitaire – pour creuser et enrichir ce terme/concept forgé par Paul Virilio.

A ce stade-là et dans ce contexte, Friends of Europe apparaît déjà comme une des pièces maîtresses de cette dynamique politique collusive dans l’espace européen, en tant que carrefour de réseaux politiques, entrepreneuriaux, médiatiques et syndicaux contribuant, enchevêtrés, à tisser ce qui s’apparente tout autant à un think network qu’à un simple think tank, c'est-à-dire à une organisation dont l’émergence et la diffusion des idées repose pareillement  sur une dynamique de réseau (network) que sur celle d’un laboratoire-réservoir (tank) ou d’un char d’assaut (tank/vecteur stratégique), ce qui confirme bien l’histoire du terme qui vient du registre militaire (1), via la Rand Corporation (créée en 1945) émanation de l’US Air Force et de la firme Douglas Aircraft. Think tank  qui dans le concept à caractère stratégique a été inventé par la Fabian Society en 1884 (voir fiche sur notre site), au nom inspiré par le général romain Quintus Fabius qui privilégiait les stratégies basées sur le harcèlement et l’effet de surprise indécelable, aux attaques frontales et « annoncées ».

(1) « Jusqu’aux années 1940, la dénomination think tank n’existe pas. Elle apparaît pendant la seconde guerre mondiale. On commence alors aux Etats-Unis à les appeler « boîtes à cerveaux » (brains boxes). Dans l’argot de guerre de l’époque, le « think tank » est la salle où les stratèges préparent leurs actions. C’est à partir de 1959, en référence à la Rand Corporation, que l’expression est utilisée dans le sens actuel. »
In  Les think tanks cerveaux de la guerre des idées  -Stephen Boucher et Martine Royo – Ed Kiron Le Félin – 2006- p.48.
Préface de Pascal Lamy, membre du praesidium de Friends of Europe et ex membre de Rand Corporation Europe !

Enfin, par le grand nombre de personnalités des institutions européennes qu’accueille le directoire de Friends of Europe, on ne peut écarter l’hypothèse que FoE soit une sorte de réseau politique collusif, profondément enchâssé aux institutions européennes, pratiquant ce que j’appelle l’ « influence intégrée » : une influence qui n’agit pas de l’extérieur d’une institution politique (comme FoE le dit) pour s’efforcer de lui faire adopter ses vues, mais enchevêtrée à elle, de telle façon que la question de la limite identitaire entre le réseau d’influence et de celle de l’institution politique cible (ici l’Union Européenne) en devienne pratiquement indéfinissable, au point que l’on peut se demander si l’on n’a pas affaire là à un nouveau genre de gouvernance politique où tous les pouvoir sont confondus. Car telle est bien aussi la question qui se pose quand on observe la composition détaillée de Friends of Europe :

Où est la limite, la ligne frontière qui séparerait ce réseau des institutions de l’Union Européenne ?

Afin de donner sens à ces premières remarques et questions de fond, il est nécessaire de porter l’analyse beaucoup plus en détail et sans plus tarder au sujet de Friends of Europe / les amis de l’Europe. On propose le parcours d’analyses suivant, pour l’étude :
1) Des fonctions stratégiques des principales personnalités–clé de ce directoire
2) Des fonctions et compétences politiques nationales de ces personnalités.
3) Des fonctions politiques et de gouvernance au sein de FoE dans les institutions européennes.
4) Du rôle de ces personnalités dans le processus d’élaboration du Traité Constitutionnel Européen puis du Traité de Lisbonne: Etude de cas.
5) De la dynamique des réseaux d’influence au sein de Friends of Europe.
6) De la présence de membres d’organes de presse.
Et enfin une conclusion en guise de synthèse.

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Les fonctions stratégiques des principales personnalités–clé de ce directoire :

J’en ai retenu 10 parmi ces 56 membres éminents, en prenant comme critère l’importance stratégique que recouvrent leurs différentes fonctions (actuelles ou passées) et en tant que celles-ci leur donnent des compétences, voire des opportunités, qui donnent à ces « Amis de l’Europe » toutes les qualités d’excellence d’un think tank/réseau d’influence d’élite exceptionnel. Ce sont :    

 Le Vicomte Etienne Davignon, un omni président :

A lui seul, Etienne Davignon concentre des fonctions stratégiques et un parcours qui sont à l’image des collusions de pouvoirs et mouvements de « portes à tambour » qui structurent le directoire de Friends of Europe : des fonctions politiques dans la haute administration nationale, puis multilatérale, puis des responsabilités dans la haute entreprise, le tout panaché par des fonctions décisives dans nombre de réseaux d’influence majeurs.
a) Ses activités politiques nationales : Etienne Davignon a occupé différentes fonctions, notamment de Chef de Cabinet auprès des différents ministères des affaires étrangères de Belgique de 1959 à 1977. Toutes activités qui lui ont valu de recevoir le titre honorifique de Ministre d’Etat de la main du Roi Albert II en 2004.
b) Ses activités politiques multilatérales : De 1974 à 1977, il a été le premier président de l’Agence Internationale de l’Energie pour devenir Vice Président de la Commission Européenne, en charge de l’industrie, la recherche et l’énergie, de 1981 à 1985. De plus il a participé au Rapport Harmel sur l’avenir de l’OTAN.
c) Ses activités politiques dans les réseaux d’influence : Le vicomte Etienne Davignon, après en avoir été membre depuis 1974, est président du transatlantique et très élitiste Groupe de Bilderberg (créé en 1954), objet de tous les fantasmes conspirationnistes, premières victimes de la discrétion, voire du secret dont il s’entoure : pas de site internet et une seule activité connue, celle d’une rencontre-échange annuelle sur trois jours et à chaque printemps. S’y retrouve sur invitation une sélection de l’élite, principalement transatlantique, dans les domaines politiques : représentants d’Etats (Chefs d’Etats, 1er Ministres, Ministres, secrétaires d’Etat, députés, etc…), représentants d’organisations multilatérales (OMC, Banque Mondiale, OTAN, Union Européenne, Banque Centrale Européenne, etc…), représentants du monde de la finance (banques centrales et dirigeants de grandes banques privées), représentants et patrons de la grande industrie, dirigeants de réseaux d’influence majeurs et enfin des « leaders d’opinion » … à savoir des journalistes. Tout ce beau monde (plus d’une centaine de participants) est convié à réfléchir aux grandes questions géopolitiques du moment dans une série de débats « off the record », à savoir « où tout peut-être dit mais d’où rien ne doit sortir ».
Ce type de fonctionnement pose à mon sens, et entre autres, une question majeure : le consentement et l’acceptation par des représentants politiques de ne pas informer leurs concitoyens sur le contenu d’une réunion politique à la quelle ils participent en tant que tels, et le même type d’attitude symétrique de la part des journalistes par rapport à leur lectorat.
Ainsi Nicolas Beytout (alors rédacteur en chef des Echos) déclarait à ses confrères de Libération dans un remarquable article d’investigation (1)(et à ma connaissance le seul) sur la réunion du Bilderberg, à laquelle il avait participé Versailles, en 2003 :

                                           « Le Bilderberg, c’est une superbe réunion très méconnue et qui gagne à le rester ! »

Nicolas Beytout  -  Alors Rédacteur en  chef  des Echos, puis du Figaro. Dirige depuis 2008 le groupe de presse de LVMH, propriété de Bernard Arnault  qui a racheté Les Echos… N. Beytout est un participant régulier aux sommets du Bilderberg group.

(1) Libération, article du 05 août 2003 : Dans les coulisses de Bilderberg –
Enquête exclusive sur un huit clos où tout peut se dire mais d’où rien ne doit sortir –Christian Losson, Jean Quatremer et Pascal Riche - (Lien avec cet article)

On rajoutera sur ce point que les rapporteurs des débats (où il est interdit aux participants de prendre des notes) sont traditionnellement deux journalistes de The Economist, mais dont le travail reste uniquement à destination interne au Groupe de Bilderberg ! 

Tout aussi préoccupant pour la démocratie, la participation de représentants politiques institutionnels à ce genre de « rencontre au sommet », (dont on ne sait même qui les finance !), selon une procédure où ils ne doivent pas référer du contenu à ceux qu’ils représentent !
Et qui s’en soucie ? Au moins quelques députés européens dont Patricia Mac Kenna (groupe des Verts), qui, dans le cadre des « questions à la Commission » a interrogé très pertinemment l’institution sur la participation de Commissaires (4 à 5 par an) à ce type de réunion en 2000.

(Lien avec le document, prélevé sur le site de l’Union Européenne – sa question et la réponse de R. Prodi)

La réponse de la Commission Prodi vaut le détour, on peut en résumer les termes comme suit :

- La Commission  reconnaît que des Commissaires européens participent à ce type de réunion (Commission Trilatérale puis Groupe de Bilderberg).
- La Commission  qualifie ces rencontres de « forums internationaux » alors que P. Mc Kenna les qualifiait de « réunions secrètes » ; alors qu’un forum est par définition un espace ouvert à tous et que le Bildelberg Group se réunit dans un espace sur sécurisé et filtré (avec utilisation des forces de l’ordre du pays d’accueil – selon quelle légitimité ?), et qui plus est sur la base d’échanges dont le contenu nominatif doit être tenu secret). En clair on ne peut savoir ce qu’y disent nos responsables, un compte rendu officiel global n’est pas non plus effectué, alors que des officiels y participent !
- La Commission  juge que les Commissaires ne s’y rendent pas en tant que tels, mais à titre personnel. (Alors qu’ils sont officiellement présentés ainsi sur place !)
- Et enfin, la Commission  indique que leurs frais relatifs à ces « forums » sont pris en charge par les institutions européennes … en ce qui concernait la précédente Commission Santer, mais de dit rien en ce qui concerne … la Commission qui répond, c’est-à dire elle-même : la Commission Prodi !
On soulignera bien sûr la contradiction qui fait bondir dès la première lecture : Si les commissaires européens sont sensés  se rendre à ce genre de réunion à titre personnel et non pas en tant que représentants de l’Union, alors pourquoi la commission (l’institution) prend-elle en charge leurs frais occasionnés ! Qu’en est-il aujourd’hui ? Après nombre d’autres questions de députés européens à Romano Prodi puis à José Manuel Barroso (voir plus bas / Daniel Janssen), on n’est pas plus éclairé.

Etienne Davignon, ex vice président de la Commission européenne est donc Président d’une des organisations qui met en œuvre ce type de réunion opaque, et … c’est la seule activité connue du Groupe de Bilderberg ! Une organisation qui cultive donc l’opacité au point qu’elle la diffuse – et ce n’est pas la seule. A moins que l’opacité soit devenue la règle des relations internationales et que le concept de « valise diplomatique » ait généré une gamme de variantes complètes et variées.

Mais Etienne Davignon n’occupe pas cette seule fonction de présidence dans le monde des réseaux d’influence, il est également président de l’Institut Paul Henri Spaak, de l’Institut Royal des Hautes Etudes et de l’Institut Royal des Relations Internationales (toutes structures belges) et il est aussi Président du Conseil de surveillance du CSR (Corporate Social Responsability), fondé par Jacques Delors en 1995.
De plus, il est vice président du Centre for European Policy Studies (CEPS), un des think tanks les plus réputés de Bruxelles et financé par 114 firmes globales. Il est aussi membre du conseil d’administration de European Institute, tout aussi réputé.

Par ailleurs Etienne Davignon a été membre de l’ERT (European Round Table of industrialists) de 1986 à 2001 et il semblerait qu’il soit aujourd’hui son Président. En effet il est mentionné à cette fonction dans de nombreuses fiches biographiques (dont celle de Wikipedia) et il a donné en février 2007 une interview en tant que Président de l’ERT à Easybourse (Lien avec l’entretien), mais quand on consulte le site de l’ERT, on ne le trouve nulle part à cette fonction, ni pour 2007, ni pour aujourd’hui (2008). L’ERT ne se reconnaît qu’un seul Président (chairman) depuis 2005 : Jorma Ollila (Nokia). Doit-on en déduire qu’Etienne Davignon est la Président furtif de la Table ronde des industriels européens ? L’ERT, puissant réseau de l’industrie européenne qu’il a contribué à créer en 1983 alors qu’il était vice président de la Commission européenne et commissaire à l’industrie (voir site ERT).  L’ERT, à la fois lobby et think tank (comme nombre de lobbies) et bien qu’il se défende d’être l’un et l’autre sur son site, l’ERT qui regroupe 45 firmes majeures européennes qui représentent un chiffre d’affaire cumulé de 1600 milliards d’€ et 4,5 millions d’emplois.  Poids lourd du lobbying à Bruxelles, L’ERT  inonde les institutions européennes de ses analyses et recommandations. On relèvera que l’un des deux vice Chairmen/Présidents actuels de l’ERT n’est autre que Peter Sutherland, autre omni président (Chairman de British Petroleum et de Goldman Sachs, Président Europe de la Commission Trilatérale et Président honoraire Europe du Transatlantic Policy Network, entre autres de ses nombreuses fonctions).

Enfin Etienne Davignon, membre de la Commission Trilatérale a été le seul président de l’AUME (Association pour l’Union Monétaire Européenne), fondée en 1987 par Valéry Giscard d’Estaing, Helmut Schmidt et…l’ERT. Think tank dont le rôle était de mettre en œuvre tout acte  judicieux de communication et de stratégie politique afin de créer une monnaie unique européenne. Structure dissoute en 2001 après la réalisation de sa mission concrétisée par la ratification du traité de Maastricht ; et donc structure très difficile à étudier.
Ex gouverneur de la prestigieuse et britannique Ditchley Foundation, E. Davignon en serait toujours membre.

Pour finir, et c’est sa plus récente adhésion, E. Davignon est l’un des cinquante membres fondateurs composant le conseil de l’European Council on Foreign Relations créé en octobre 2007. Ce réseau collusif récent, sans lien apparent avec le CFR (Council on Foreign Relation), financé par le milliardaire et spéculateur Georges Soros, regroupe un vaste éventail de l’élite globale et s’annonce d’ores et déjà comme un des poids lourds de l’influence européenne. On y retrouve sept membres de Friends of Europe dont Pascal Lamy (directeur général de l’OMC) qui y côtoie d’autres dirigeants d’organisations économiques multilatérales majeures puisqu’on y trouve également Dominique Strauss-Kahn (président du Fonds Monétaire International) et l’omniprésente Anna Palacio de Valelersundi, ex vice Présidente de la Banque Mondiale et avocate générale de Paul Wolfowitz (du 16 juin 2006 au 15 avril 2008), et actuellement vice Présidente des affaires étrangères et du marketing d’AREVA. L’ECFR, un réseau qui méritera toutes les attentions de notre introspection  citoyenne.        

Etienne Davignon est donc un des princes majeurs de l’influence européenne et de ce que j’appelle la géopolitique furtive, éminence en la matière, et avec laquelle on ne voit guère que Peter Sutherland pour rivaliser avec lui.
D’autant que toutes ses multiples activités de première incidence politique pour lesquelles il n’a jamais rendu compte aux citoyens européens que nous sommes, se complètent par nombre de fonctions dans le monde de l’entreprise et se rajoutent de façon éclairante à ses activités politiques nationales, multilatérales passées et maintenant dans le monde des réseaux d’influence que nous venons de survoler et où il est toujours très actif.

d) Ses activités dans le monde de l’entreprise :

En effet, Etienne Davignon est :

-- Président de la Société Générale de Belgique, d’Union Minière, de Recitel et de SN Airholding

-- Vice-président d’Accor, d’Arbed, Suez-Tractebel, Fortis Belgique, Umicore et Sibeka

---Administrateur ou Membre du conseil de Surveillance d’Anglo American Mining, Gilead, ICL, Pechiney, Foamex, Kissinger Assiociates, Fiat, Suez, BASF, Solvay, Sofina, Recticel, CMB Compagnie Maritime Belge, Cumerio SN, Brussels Airlines, BIAC, Petrofina et Real Software.   
Et ex membre du Conseil consultatif international de Carlyle Group.

Faut-il commenter ? Si ce n’est pour préciser qu’Etienne Davignon, Président des « Amis de l’Europe », c’est « tous pouvoirs confondus », pour reprendre l’expression-titre du livre remarquable de Geoffrey Geuens. Et convenons en, si nous n’avons jamais voté pour lui, il nous l’a bien rendu !

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Pascal Lamy : le Directeur Général de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC),
membre du Praesidium de Friends of Europe.

La carrière de Pascal Lamy est à elle seule caractéristique des errances du socialisme et de ce qui a fait glisser progressivement une partie de ses élites vers le social libéralisme.  
Ce parcours a doté aussi cet ancien diplomé  d’HEC, de l’IEP et de l’ENA de solides compétences et de profondes connaissances dans les domaines politiques nationaux et multilatéraux, dans les secteurs de l’entreprise et de façon massive dans les réseaux d’influence et autres think tanks, toutes capacités qui ne peuvent qu’enrichir Friends of Europe, d’autant qu’il est actuellement le Directeur Général de l’Organisation Mondiale du Commerce. Il se retrouve donc ipso facto aussi membre d’une organisation (FoE) qui compte nombre de firmes globales majeures parmi ses membres/partenaires et financeurs (VIP-members) alors que sa charge et sa mission au sein de l’OMC l’emmènent à mettre en œuvre des politiques commerciales qui ne sont pas sans rapport avec les intérêts des dites firmes.
Sans vouloir porter aucune accusation quelle qu’elle soit : ne serait-il pas souhaitable qu’une telle charge implique au moins la mise en retrait pendant un tel mandat à des charges de direction (praesidium ou conseil d’administration, de surveillance, international) dans des organisations type think-tanks, financées par des entreprises qui sont actrices de l’économie et du commerce mondial, afin d’éviter toute possibilité de conflit d’intérêt direct ou indirect avec la charge de direction d’une organisation multilatérale dont l’objet revêt un enjeu considérable pour elles. Ma remarque vaut certes pour le FMI mais aussi pour la Banque Mondiale, la Banque Centrale Européenne, bien sûr pour l’Union Européenne et pour toute autre organisation multilatérale de ce genre. 
Pour l’essentiel des activités de Pascal Lamy, on renverra à la fiche biographique Global Leaders qui lui est consacrée dont je livre ci-dessous une courte synthèse.  ((G.L.)) 
Après avoir remarqué que toutes les activités qu’il a menées l’ont mis davantage en relation avec les problèmes et us et coutumes de la haute entreprise qu’avec les problèmes sociaux des populations, on soulignera que le profil de Pascal Lamy est notoirement différent de celui d’Etienne Davignon. Alors qu’Etienne Davignon est très impliqué dans des prises de responsabilités au sein d’entreprises et qu’il occupe de nombreuses fonctions de présidence à la tête de réseaux d’influence, tel n’est pas le cas de Pascal Lamy, ses relations avec ces deux milieux se fondent tout autrement.
En effet, notre ancien conseiller du Ministre des finances Jacques Delors, (qu’il suivra quand celui-ci deviendra président de la Commission Européenne, pour devenir son Directeur de cabinet) ne croise directement le monde de l’entreprise qu’en deux endroits de sa carrière : A la fin de cette première charge européenne en 1994,  pour devenir Directeur Général du Crédit Lyonnais jusqu’à sa privatisation qu’il a largement contribué à finaliser en 1999. Mais période aussi pendant laquelle il est également Président de la Commission prospective du MEDEF.
Un parcours déjà exceptionnel pour un membre du parti socialiste français (depuis 1969) et membre de son comité directeur (de 1985 à 1994) ! Mais parcours qui ne s’arrête pas là puisque quittant le Crédit Lyonnais il devient Commissaire européen au commerce de 1999 à 2004 (Commissions Prodi puis Barroso), date à laquelle il quitte cette fonction pour devenir Directeur Général de l’OMC.
On trouve donc déjà dans ce parcours une figure tout à fait exceptionnelle de « porte à tambour » qui des couloirs politiques socialistes nationaux puis de l’Union Européenne, le mène à la direction d’entreprise puis à des fonctions éminentes au MEDEF, pour le faire revenir à l’Union Européenne (mais pour une charge beaucoup plus importante) et pour enfin le mener à diriger une des institutions multilatérales mondiales majeures : l’OMC.

Digression sur le néolibéralisme et le social libéralisme

Une carrière social libérale pourrait-on dire et qui fait apparaître que le dit social libéralisme (comme d’ailleurs le néolibéralisme) n’est pas uniquement  une idéologie politico-économique  mais que c’est aussi  dans le temps et dans l’espace un construit socio-anthropologique de nos élites, tout au long duquel elle s’est sédimentée et formalisée  en tant qu’idéologie  mais aussi structurée en tant qu’organisation politique multilatérale du monde.
Ainsi chercher les racines du néolibéralisme (ou de sa variante social-libérale), comprendre sa substance, ce n’est pas uniquement analyser les théories de l’Ecole Chicago et de ses épigones ainsi que les conséquences de leurs actes, bien catastrophiques d’ailleurs aujourd’hui.
De plus en ce qui concerne cette dimension historique du social-libéralisme, il est clair comme nous l’avons suggéré ailleurs, qu’il nous faut remonter beaucoup plus loin dans l’analyse de ses origines : jusque dans le darwinisme social au XIXe siècle puis dans le solidarisme de Léon Bourgeois et de Georges Clemenceau, enfin dans la philosophie politique et aux ouvrages de Walter Lippmann (« Public opinion » en 1921 et « The Phantom Public » en 1927 – Lippmann recruteur en 1917 des membres de « The Inquiry » à l’origine du Council on Foreign Relations créé officiellement en 1921, je le rappelle)  et d’Edward Bernays (« Propaganda » en 1928) pendant la période d’entre-deux guerres au XXe siècle.

Dans le prolongement de cette réflexion et pour faire court, on peut alors affirmer que le social libéralisme est concomitant à l’invention même du terme « néolibéralisme » qui remonte en fait au Colloque Lippmann (en août 1938) qui se proposait de refonder le libéralisme de sorte qu’il puisse faire pièce de façon durable au keynésianisme et au New Deal de Franklin D. Roosevelt (tout en étant influencé par eux). Colloque dont le philosophe Serge Audier (professeur à la Sorbonne) a eu l’intéressante idée de livrer analyse (remarquable) et traduction intégrale de ses actes en 2008. En effet dans les débats de ce colloque on apprend en lisant la retranscription de la séance du 30 août 1938 dont le motif était « L’agenda du libéralisme » que le terme pour désigner la philosophie politique de Lippmann (participant vedette) est débattu après son intervention inaugurale ce jour-là et ce dans des termes qui ne peuvent que nous interpeller sur cette question du social-libéralisme. Extraits :

«  - M. Rueff : Ces débats aboutissent à une conclusion de grande importance. Je souscris pleinement au texte de M. Lippmann. Il jette les bases d’une politique que, pour ma part, je qualifie de politique libérale de gauche, parce qu’elle tend à donner aux classes les plus démunies le plus de bien-être possible. C’est à ce titre que je me rallie sans réserve aux idées de M. Lippmann.
   - M. Marlio : (…) Je suis d’accord avec M. Rueff, mais je ne voudrais pas que l’on employât l’expression « libéralisme de gauche » car cela ne me paraît pas juste et je pense qu’il y a, à l’heure actuelle, à peu près les mêmes vues à gauche qu’à droite. Ensuite cela donnerait l’impression que nous défendons la cause d’un parti politique.
J’aimerais mieux qu’on appelât cette doctrine « libéralisme positif », « libéralisme social » ou « néo-libéralisme », mais pas le mot de gauche qui indique une position politique. La couleur politique ne doit pas intervenir. »

Mardi 30 août 1938 au matin, Actes du Colloque Walter Lippmann – 26-30 août 1938 - Institut de Coopération intellectuelle - Paris
In : Serge Audier  - Le Colloque Lippmann/ Aux origines du néo-libéralisme – Ed. Le Bord de l’eau /Les voies du politique – 2008 -  p. 343, 344
Un ouvrage remarquable à lire à tout prix si l’on veut comprendre une bonne part des origines du néo-libéralisme et de ses développements depuis 1938 à aujourd’hui, et ce hors de la vulgate habituelle

Et de fait ce colloque, comme l’a mis en évidence le travail de Serge Audier, a mis en œuvre tout un champ de réflexion dans le domaine du libéralisme social, alors qualifié de néo-libéralisme. Mais par la suite ce libéralisme social en a progressivement été expurgé (notamment à la Société Mont Pèlerin, de sorte que le néo-libéralisme est devenu ce que nous en connaissant depuis les années 80 : à savoir l’idéologie du marché-roi et qu’il serait plus juste de nommer ultra libéralisme. De fait, d’une certaine façon, ce que nous nommons social-libéralisme peut-être interrogé comme une sorte de retour au néo-libéralisme des années 20 / 30 qui doit compter à mon sens aussi dans toute histoire de la social-démocratie et de ses différentes écoles.
Quoi qu’il en soit, ce colloque a eu des conséquences qui ne sont pas négligeables, notamment dans la création de réseaux d’influence / think tanks. En effet le 30 août 1938 après midi, les participants décident de la création du Centre International d’études pour la Rénovation du Libéralisme (CIRL siégeant à Paris). Suivront la Société Mont-Pèlerin en avril 1947 (qui a regroupé des membres du Colloque Lippmann, dont l’économiste Friedrich Von Hayek, considéré comme l’un des pères de la théorie néo-libérale actuelle), puis l’Institute of Economic Affairs (IEA) en Grande Bretagne en 1955. Toutes organisations qui ne sont pas pour peu dans la fécondation de la théorie néo-libérale « dure » et de ses « boîte à outils » dont Margaret Thatcher et Ronald Reagan feront plus qu’usage à la fin des années 1970 et au début des années 1980 ; on connaît mieux la suite, enfin croit-on.

De la sorte, le social-libéralisme n’est pas, du point de vue de sa philosophie politique, une innovation récente de la fin du XXe et du début XXIe siècles. La question social-libérale est dans son esprit au fondement même de la théorie néo-libérale au point de se confondre avec lui, en tant qu’elle est le contrepoint essentiel et « moral » du libre marché tel qu’imaginé par « les pères fondateurs » de 1938. Et j’en donnerais un exemple à mes yeux flagrant :
A l’heure où j’écris ces lignes, une crise économique d’une ampleur telle que le monde n’en a pas connu depuis l’entre-deux guerre ravage l’économie planétaire. Sa source évènementielle, nous le savons tous est la crise des subprimes aux Etats-Unis, point terminal d’une « économie de casino » qui s’est développée depuis le début des années 80 – pour faire lapidaire. Des banques et compagnies d’assurances majeures ont fait ou ont menacé de faire faillite aux Etats-Unis menaçant à leur tour l’effondrement du système financier mais aussi du système social outre atlantique et par voie de conséquence économies et sociétés mondiales. Afin d’éviter la catastrophe, l’Etat fédéral, après avoir injecté dans le système des milliards de dollars a été contraint de nationaliser certaines de ces entreprises financières en déroute, se basant sur un motif social, et qui n’est malheureusement pas entièrement faux : éviter de ruiner des millions d’épargnants et de les priver de leurs retraites, entre autres. De la sorte les centaines de milliards utilisés par l’Etat sont ceux du contribuable, tant et si bien que l’on a pu crier à juste titre au scandale : « Privatisation des bénéfices et socialisation des pertes », et c’est bien le cas en effet, l’Etat Casino rembourse les dettes des gros perdants à l’aide des deniers des employés, au titre que c’est la seule solution pour maintenir leur emploi, c'est-à-dire que la « structure casino » puisse continuer à tourner. Que les Etats-Unis nationalisent des acteurs majeurs de leur économie, même Olivier Besancenot n’en aurait sans doute pas rêvé, et même si je doute fort qu’il en approuve les termes, toujours est-il que l’on assiste-là à une figure économico-politique que l’on nous présente somme étant « socialisante », en rupture avec les us et coutumes du « néolibéralisme ». Il n’en est rien, elle est énoncée par Walter Lippmann en 1938 lors de ce même colloque, c’est là le point 6 (et plus particulièrement 6C) de son intervention du matin du 30 août, qui précédait les réactions plus haut citées :

« 6 – Ainsi donc, quoique le libéralisme ait pour postulat fondamental la régularisation de la production par le mécanisme des prix du marché, le régime que nous souhaitons reconnaît :
A. – Que les prix du marché sont affectés par le régime de la propriété et des contrats.
B. – Que l’utilité maxima est un bien social, mais n’est pas nécessairement le seul qui doive être recherché.
C. – Que, même lorsque la production est régie par le mécanisme des prix, les sacrifices qu’implique le fonctionnement du système (le marché ndlr) peuvent être mis à la charge de la collectivité. En ce cas, le transfert doit être fait non par des méthodes indirectes, mais en pleine lumière, et le sacrifice demandé à la collectivité doit être expressément et consciemment consenti. »
Opus cit. p. 342, 343. »

Ainsi donc voilà dès 1938, tout le sel du néo-social-libéralisme et qui explique grandement pourquoi les candidats à la présidence, républicain (Mc Cain ) et démocrate (Obama) aient approuvé sans sourciller les « sacrifices » prescrits par le docteur Bush : Sauver le dieu-marché à tout prix, voilà ce qui importe et mérite tous sacrifices « consentis ».
Dans un tel contexte idéologique, sauver par exemple les retraites des citoyens des Etats-Unis par une réforme structurelle en remplaçant leur financement actuel par fonds de pension (fragiles en cas de faillite bancaire), par un système par répartition (ce qui pourrait être fait quasi instantanément : les salariés actifs du moment payant pour les retraités du moment) procède d’une toute autre idéologie, celle venant d’un monde extraterrestre sans doute.   

Par ailleurs outre l’aspect idéologique et son histoire, comprendre le « néolibéralisme », l’ultralibéralisme et le social libéralisme dans toute leur profondeur c’est aussi et peut-être surtout analyser dans toute sa complexité la formation de nos élites dans tous leurs cheminements professionnels et leurs prises de responsabilités dans la politique nationale, dans les organisations multilatérales qui se sont multipliées depuis 1945, dans le monde de l’entreprise en plein essor global également depuis cette époque et dans celui plus opaque des réseaux d’influence et think tank dont le nombre a aussi explosé, car c’est dans ces mouvements de portes à tambour, de chaises musicales, et de fonctions multi casquettes qui rythment les carrières de chacun d’entre eux  que s’est constitué progressivement le « néolibéralisme » en tant qu’organisation politique furtive globale et complexe tout autant que comme idéologie politique et économique généralisée, s’auto définissant pour finir et qui plus est comme horizon indépassable où le citoyen est perpétuellement mis hors-jeu des choix décisifs alors uniquement pris par des élites « éclairées » ; élites pour lesquelles il n’a le plus souvent jamais voté (et tel est le cas de Pascal Lamy).

De la sorte, le néolibéralisme c’est aussi et peut-être surtout une organisation politique globale du monde qui viole le principe de séparation des pouvoirs économiques et politiques.

Dit autrement, le néolibéralisme est un construit socio anthropologique global et historique de nos élites et donc aussi des institutions politiques qu’ils dirigent, particulièrement dans un cadre multilatéral naturellement plus opaque, fuyant, lointain et complexe pour le citoyen.

On ne se rend pas compte du défi immense et indispensable que représente celui de démocratiser nos institutions multilatérales, il ne s’agit pas d’en changer uniquement l’idéologie politique dévastatrice (aux origines complexes) qui y domine, il s’agit aussi et peut-être surtout d’en refonder l’organisation politique et la technostructure multilatérale de telle sorte que les pouvoirs privés et publics n’y soient plus confondus.         
Il est vrai que c’est beaucoup plus complexe que de désigner l’ENA et autres grandes écoles comme des boucs émissaires, antres des causalités diaboliques de tous nos maux ou bien d’agiter je ne sais trop quelle théorie de complot mondial, néolibéral ou autre.
Bref, « ce qui importe - comme disait Albert Camus - c’est de trouver des solutions dignes dans une histoire qui ne l’est pas ».

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Mais Pascal Lamy donc, c’est aussi des participations importantes dans nombres de think tanks qui sont autant de think network. 
Ex membre de l’Institute of East West Studies, de l’Overseas Development Council, du Mouvement Européen et de RAND Europe, il est aujourd’hui, outre sa fonction de membre du praesidium de Friends of Europe : Président honoraire de Notre Europe et de l’Institut des Relations Internationales et Stratégiques, membre du conseil d’orientation d’ « En Temps Réel » (issu avec la République des Idées de la dissolution de la Fondation Saint-Simon), membre du Conseil d’orientation d’ « A Gauche, en Europe » (en sommeil depuis le départ à Washington de DSK) et membre du bureau du Siècle (après en avoir été trésorier), un club dont l’objet essentiel est de cultiver « l’entre-soi » propre aux élites politiques, économiques et médiatiques françaises.

Pascal Lamy est également membre du très élitiste et british Centre for European Reform (CER), créé en 2000 et dont le but est, selon leur site :
« d'améliorer de façon significative la qualité des débats concernant l'avenir de l'Union Européenne. Le CER est un forum dans lequel sont invitées à s'exprimer des personnalités de toute nation sur les sujets sociaux, politiques et économiques auxquelles l'Union Européenne est confrontée. Il cherche à développer des échanges avec d'autres organisations similaires dans l'ensemble des pays européens, en Amérique du Nord et dans le reste du monde. » Ce « forum » effectivement comprend des personnalités des plus éminentes et tout à fait aptes en effet « à développer des échanges avec d'autres organisations similaires dans l'ensemble des pays européens, en Amérique du Nord et dans le reste du monde » puisque l’on retrouve dans ce staff : le Président du Council on Foreign Relations (Richard Haas / USA), le Président Europe de la Trilateral Commission (Peter Sutherland / chairman de Goldman Sachs et de British Petroleum et co président honoraire du Transatlantic Policy Network), 5 gouverneurs de la Ditchley Foundation dont John Monks à nouveau (Secrétaire Général de la Confédération Européenne des Syndicats). On y remarque par ailleurs trois autres membres de Friends of Europe (Carl Bildt, John Monks et Antonio Vitorino / Praesidium comme Lamy) ainsi que des représentantes des médias (Pauline Neville Jones / BBC) et Christine Ockrent (France Télévision).
Le Chairman du CER n’est autre que Nick Butler (vice Président du département « Stratégie » de British Petroleum et trésorier de la Fabian Society (voir article sur ce site) dont l’objet est de promouvoir les idées socio démocrates en grande Bretagne. On notera par ailleurs que Terra Nova (think tank socio démocrate français, créé en 2008) indique, entre autres, des liens privilégiés avec le Centre for European Reform sur son site.
De plus, le directeur de la politique étrangère du CER n’est autre que Mark Leonard, auteur en 2005 de «Pourquoi l’Europe dominera le XXIe siècle ». Ouvrage dans lequel l’auteur brosse en guise de conclusion un nouveau schème d’organisation du monde reposant sur les organisations multilatérales régionales qu’il nomme « clubs » :
 
« En créant un ensemble de clubs qui se chevauchent pour traiter du commerce, de la prolifération nucléaire, du développement économique, des épidémies mondiales, et du soutien aux Etats en difficulté, il sera peut-être possible un jour de les rassembler dans un cadre unique »
Mark Leonard - Pourquoi l’Europe dominera le XXIe siècle – Ed Plon – 2005 – p. 194

Mais bien sûr, Mark Leonard adepte du constructivisme furtif « oublie » dans son ouvrage de nous renseigner et de nous éclairer sur le rôle de ces autres clubs biens réels que sont les réseaux d’influence et think tanks que pourtant il s’empresse de remercier à la fin de son livre pour l’aide qu’ils lui ont apporté afin d’en réaliser la rédaction. Ironie de son ouvrage, l’un de ses chapitres s’intitule « La main invisible de l’Europe » mais dans lequel on ne trouve nulle mention de ces « petites sociétés » qui structurent la géopolitique de l’Union Européenne.
  
Le Centre for European Reform peut donc aussi compter sur les lumières économiques internationales de celui qui dirige l’OMC pour mener son vaste programme de réorganisation de la gouvernance mondiale : Pascal Lamy.

Enfin, Pascal Lamy, et c’est plus récent, est l’un des cinquante membres fondateurs du tout aussi élitiste European Council on Foreign Relations (ECFR), créé en octobre 2007, et dirigé par… Mark Leonard.  Cette organisation ne semble avoir pour l’instant aucun lien direct avec le CFR (Council on Foreign Relations), mais plutôt dans sa philosophie : celle de créer un réseau stratégique afin de peser au mieux sur les relations internationales en regroupant un staff d’élite qui mérite que l’on s’y attarde.
On trouve dans cette équipe dirigeante et l’ECFR – réseau qui méritera toute notre attention : sept membres de Friends of Europe et quatre de l’ACED (qui a remis sur les rails le processus de ratification des traités institutionnels européens en 2006 – voir sur le site). Au milieu d’un aréopage constitué d’anciens Présidents et premiers ministres d’Etats, d’anciens ou d’actuels commissaires et parlementaires européens, de dirigeants d’entreprises prestigieuses et de représentants des médias et du monde culturel, on y remarquera la présence de Lionel Jospin, Dominique Strauss Kahn (FMI), Alain Minc, Etienne Davignon, Daniel Cohn-Bendit (Terra nova aussi), Georges Soros (milliardaire et spéculateur, président de l’Open Society, fondation qui finance l’ECFR et dont les membres y sont omniprésents), Anna Palacio (Council on Foreign Relations, Banque Mondiale et AREVA), Pierre Moscovici, Christine Ockrent, Joschca Fisher ou encore Alexander Stubb (ex député européen, qui mérite un petit éclairage : Président de la commission parlementaire chargée de proposer un projet de résolution afin de contrôler les actions de lobbying auxquelles sont soumises les institutions européennes ; petit détail : à la date de ce mandat, Mr. Stubb était en même temps membre du Transatlantic Policy Network, dont 40 firmes transatlantiques sont membres ! Rappelé en cours de mandat par le gouvernement finlandais pour devenir Ministre des affaires étrangères, il est l’actuel président de l’OSCE. Autre petit détail, il a été remplacé à la présidence de la commission parlementaire « lobbying  » par Ingo Friedrich … autre eurodéputé lui aussi membre du TPN, sans que personne ne s’inquiète de cette position de conflit d’intérêts et que le parlement vote la résolution en question à une large majorité le jeudi 8 mai 2008 – voir sur notre site –
Peut-on considérer que ce vote était éclairé, dans la mesure où l’appartenance de Mr Stubb et Mr Friedrich au TPN ne figuraient ni dans leur fiche personnelle, ni dans leurs déclarations d’intérêt renseignées par tout politique européen ?

Pascal Lamy donc, s’il est présent dans nombre de réseaux d’influence, n’en dirige véritablement aucun (aucune fonction de président ou de chairman) si ce n’est de façon honoraire. Même si l’on sait que cette fonction honorifique peut être pratiquée parfois de façon active, c’est surtout dans les équipes de dirigeants qu’on le retrouve : membre de conseils d’administration, de surveillance ou de bureau de direction.
En fait c’est à Friends of Europe qu’on le retrouve hiérarchiquement le mieux placé au directoire d’un structure d’influence en réseau, dans la mesure où il y est membre du praesidium, ce qui équivaut à une charge de vice-président, juste en dessous d’Etienne Davignon.
Une place qui convient pour un dirigeant de l’Organisation Mondiale du Commerce ? Et bien oui, puisque personne ne s’en plaint.

En tous cas Mr Lamy semble avoir compris très tôt que si l’on voulait accéder à de hautes fonctions dans les organisations multilatérales, alors être présent dans les réseaux d’influence européens majeurs facilitait grandement la réalisation d’une carrière prestigieuse, car dans ces officines on est à la fois au fait des inflexions de la géopolitique furtive (où pouvoirs publics, privés et discrets sont imbriqués) tout en en étant un acteur. De plus ces réseaux / think tanks sont alors autant de scènes pour présenter ses idées de commissaire européen ou de dirigeant de l’OMC que des moyens de les diffuser tout en les imbriquant  avec celles d’autres global leaders. Et c’est ainsi que s’est construit à la fois le social libéralisme de Pascal Lamy et sur le même mode que celui qui imprègne la gauche socialiste européenne, dans la mesure où nombre de ses responsables (mais pas tous) ont procédé selon des schèmes semblables impliquant de façon prépondérante les boites à idées qui sont autant de réseaux politiques et géopolitiques.
De la sorte la collusion des pouvoirs (publics/privés/discrets) y a été le vecteur d’une collusion politique entre socialisme et néolibéralisme : un néosocialisme en quelque sorte où idéologie et construit socio anthropologique de carrière se sont créés l’un l’autre tout en forgeant nos institutions multilatérales. Dans un tel système on se demande alors ce qui fait opposition politique distincte.

Quelques autres personnalités remarquables de Friends of Europe :

J’en dresse ci-dessous une liste succincte mais exhaustive, à commencer par deux autres membres du Praesidium de FoE :

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Le Baron Daniel Janssen et la « chimie fine » des réseaux 

Président, aujourd’hui honoraire de Solvay, il est par ailleurs vice président d’UCB et administrateur de Shroders London et de Fortis. Il a par ailleurs été administrateur de Générale de Banque et membre du Conseil consultatif de Ford Company. Une personnalité particulièrement au fait de la grande entreprise, d’autant qu’il est président honoraire de la Fédération des Entreprises Privées de Belgique. Toutes qualités prisées par l’European Round Table of Industrialists (ERT) dont il a fait partie de 1991 à 2006.

Enfin, Daniel Janssen, ex membre du Comité Européen pour la recherche et le développement (du temps de la CEE), est actuellement membre du conseil consultatif international de la Commission Trilatérale pour la quelle il organise nombre de rencontres avec des institutionnels de l’Union Européenne. Ainsi le sommet de la Commission Trilatérale des 16 au 19 mars 2007 pour lequel il a contacté le Secrétaire général du Parlement européen  par deux courriers afin d’en finaliser le tenue en collaboration avec l’Union Européenne. Je livre ci-dessous les deux courriers envoyés par le Baron Daniel Janssen au Secrétaire général du Parlement.

Courrier en date du 2 mai 2006 & Courrier en date du 22 décembre 2006
(Source : site de l’Union Européenne > Documents > Parlement > Taper : Commission Trilatérale)

Malheureusement, je n’ai pu trouver les réponses émanant du Secrétaire général du Parlement à Daniel Janssen, mais dans ces deux courriers ci-dessus, on ne peut que constater combien les activités de la Commission Trilatérale (ici la tenue de ce sommet) tendent à s’imbriquer dans le fonctionnement des institutions européennes, d’ailleurs il est précisé dans le premier courrier (4ème Paragraphe) : « un dîner à l’issue duquel le Président de la Commission Européenne, Mr. Barroso –qui a accepté - prendrait la parole. » Signe qu’un échange a préexisté entre la Trilatérale et Mr Barroso.
On apprend d’ailleurs dans le second courrier sous la plume de Mr Janssen qu’un certain député européen Kurt Joachim Lauk (PPE/DE) est membre de la Trilatérale.
On me permettra de faire remarquer que ceci rentre en contradiction avec la réponse de Romano Prodi en date du 6 août 2003 au député européen Mario Borghezio (NI) et où il déclare : «Par ailleurs, aucun membre du Collège n’est membre de la Commission trilatérale dont les statuts excluent que des personnalités exerçant une fonction publique  puissent être membre. » Faut-il comprendre que le mandat de député européen ne s’inscrit pas dans le cadre d’une fonction publique ?
  Je livre ci-dessous le document de référence : la question de Mario Borghezio et la réponse ci-dessous que lui adresse le président de la Commission européenne, j’y joins également la question et la réponse à une autre interrogation précédente de Patricia Mc Kenna (Verts, quelques mois plus tôt) sur le même thème, et à la quelle R. Prodi fait référence dans la réponse qu’il adresse à M. Borghezio.

Question de Mario Borghezio & Réponse de Romano Prodi

Question de Patricia Mc Kenna  & Réponse de Romano Prodi

Et José Manuel Barroso ?

D’autres députés européens ont eu l’occasion de poser le même genre de question, notamment au sujet de la Commission Trilatérale, à l’actuel président de la Commission européenne, parmi eux le député européen Søren Bo Søndergaard (GUE/NGL), je livre ci-dessous son excellente question posée le 5 août 2008, ainsi que la réponse de José Manuel Barroso.         

Question de Søren Bo Søndergaard & Réponse de José Manuel Barroso

Dans sa réponse donc, laconique comme toutes les autres, J.M.B. dès la première phrase affirme que « La Commission n'entretient pas de lien particulier avec la commission trilatérale ». Les deux courriers de Daniel Janssen tendent à infirmer cette hypothèse : JMB a accepté d’intervenir lors du dîner en question, et en tant que Président de la Commission selon les dires de Janssen.  Mais encore pourrait-on dire que n’ayant pas trouvé les réponses de M. Barroso, je ne peux le prouver, car au fond le fait qu’un membre éminent de la Trilatérale l’écrive au secrétaire général du Parlement européen ne prouve nullement que le contenu en soit exact, ni que celui-ci lui ait répondu. Au fond, il s’agirait de courriers qui n’engagent que Daniel Janssen  et restés sans retour de la part du Secrétaire général du Parlement ; et que donc je ne peux présenter aucune preuve de « lien particulier » entre la Trilatérale et la Commission, même si d’après les deux courriers un échange constructif s’est établi entre Daniel Janssen et le Secrétariat Général du Parlement.  

Sauf que … la Trilateral Commission a un site (JM Barroso en rappelle l’adresse), qu’il suffit de l’interroger mais à l’onglet « recent events » (évènements récents), afin de vérifier si effectivement le Président de la Commission européenne est intervenu lors de l’évènement dit.      
Et en effet on y découvre que José Manuel Barroso est bel et bien intervenu lors de ce meeting de la Trilatérale (dont on ne sait véritablement qui la finance) le samedi 17 mars 2007 en soirée lors d’une « réception et d’un dîner au Parlement Européen à l’invitation d’Hans-Gert Pöttering, Président du parlement européen (et dont je rappellerais qu’il est un des 70 puis 75 eurodéputés membres du Transatlantic Policy Network, dont le président honoraire mais très actif est Peter Sutherland : Président Europe de la… Trilateral Commission) .

Lors de ce sommet se sont notamment par ailleurs succédé du 16 au 19 mars 2007 à Bruxelles : Peter Sutherland (président Europe de la trilatérale, Goldman Sachs, British Petroleum), Daniel Janssen (Friends of Europe -FoE, trilatérale, Solvay), Jean Luc Dehaene (praesidium de FoE), Karel van Miert (FoE), Mario Monti (FoE et BRUEGEL), Javier Solana ( FoE, Secrétaire général du Conseil européen,  Haut responsable de la Politique Etrangère de Sécurité Commune de l’UE), Peter Mandelson (Comissaire européen et FoE), Jean Claude Trichet (Banque Centrale Européenne), Ernest-Antoine Sellière (Business Europe/ex UNICE), Paul A. Volcker (Trilatérale), Andrzej Olechowski (Trilatérale, ECFR et Euronext), Henry Kissinger (Co fondateur de la Trilatérale avec David Rockefeller et Zbigniew Brzezinski),  Kurt Lauk (député européen, cité par Daniel Janssen dans le courrier  au Secrétaire général), Anne Lauvergeon (Areva), Yotaro Kobayashi (président Asie de la Trilatérale, Fuji Xerox), Richard Holbrooke (Council on Foreign Relations ) ou encore Adil Abd al-Mahdi (vice Président de la république d’Irak) et Jaap de Hoop Scheffer (Secrétaire général de l’OTAN) et enfin Richard N. Haas (Président du Council on Foreign Relations).  

Programme complet du sommet de la Commission Trilatérale (16/19 mars 2007-Bruxelles), selon son site.

Un programme de géopolitique furtive, prestigieuse et collusive, organisé par le Baron Daniel Janssen :
membre du praesidium de Friends of Europe !
Je conclurais sur lui en rappelant combien Daniel Janssen a eu l’occasion de vanter dans ce type de manifestation de la Trilatérale toute l’oreille attentive de la Commission européenne à l’égard des « problèmes » de la grande entreprise. Ainsi lors d’un précédent sommet de la Trilatérale, dans une allocution où il intervenait sur le thème « L’allure du changement économique en Europe », il déclarait le 9 avril 2000 à Tokyo :  

“La nouvelle commission est extrêmement bien disposée en faveur des affaires, à tel point que, quand les business man comme moi
sont confrontés à un problème qui nécessite une décision politique, nous avons accès à d’excellents commissaires
comme Monti pour la concurrence, Lamy pour le commerce mondial et Liikanen pour le commerce électronique et l’industrie. »

Texte intégral disponible sur le site de la Trilateral Commission>Annual meetings> Tokyo 2000– Citation ci-dessus : p. 79

Petit détail en forme d’épilogue : Daniel Janssen, Mario Monti, Pascal Lamy et Erki Liikanen sont aujourd’hui tous les quatre
membres du directoire de Friends of Europe !

NB : Le baron Daniel Janssen est également Membre du Conseil d’administration de Madariaga Foundation présidé par Javier Solana : Secrétaire général du Conseil de l’Union Européenne et Haut représentant pour l’Union Européenne de la  PESC – Politique européenne de Sécurité Commune et membre du conseil d’administration de Friends of Europe (voir plus bas pour un parcours de ce charmant réseau  / analyse biographique de J. Solana).

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Pat Cox, autre membre du praesidium de FoE pour une Europe « en mouvement » :

Cet ancien journaliste irlandais, de 1982 à 1986 (présentateur télé notamment) a été professeur d’économie à l’Institut d’administration publique de Dublin puis à l’Université de Limerick, où il se passionne pour les questions européennes. Il se lance alors dans la politique, inscrit au parti des Démocrates progressistes tout d’abord mais qu’ il quitte pour devenir indépendant.
Il est élu député européen en juin 1989  sur la liste « Progressive democrats », puis au parlement irlandais en novembre 1992.
Réélu au parlement européen en 1994, comme indépendant, nommé vice-président des libéraux-démocrates, puis leur président en 1998 (ELDR). Après s’être engagé pour obtenir la démission de la Commission Santer qui aboutira en mars 1999, il est donc réélu eurodéputé en juin 1999. Il devient président du parlement européen en janvier 2002 et le restera jusqu’en 2004. Inlassable partisan de l’intégration européenne pendant son mandat, alors que l’Irlande rejette le Traité de Nice par referendum, il pousse à la tenue d’un nouveau scrutin dans son pays pour lequel il fait ardemment campagne et qui se soldera finalement par un « oui ».  
La chambre de commerce des Etats-Unis lui a décerné en 2004 le premier « Transatlantic Business Award » de l’année.

Depuis cette date, c’est davantage dans le monde des réseaux d’influence qu’on le trouve en action.
En 2006 il devient Président du Mouvement Européen, créé en 1947 par Winston Churchill. Réseau d’influence qui est à l’origine de la création du Conseil de l’Europe en mai 1949, organisation intergouvernementale, antichambre de la construction puis de l’intégration européenne, ce qu’elle est toujours aujourd’hui.
Le Mouvement Européen dispense aujourd’hui une vision à la fois europhile, fédéraliste et très libérale de l’Union Européenne.
Les éléments de carrière plus haut évoqués et son action relative au traité de Nice expliquent sans doute aussi le choix de Pat Cox à la tête du Mouvement Européen dans la mesure où l’on savait bien déjà en 2006 qu’un référendum serait indispensable pour soumettre au peuple irlandais la nouvelle mouture du traité constitutionnel européen.
Referendum pour lequel il s’est par la suite dépensé sans compter avec le brillant résultat que l’on sait : le peuple souverain irlandais a rejeté le Traité de Lisbonne, se prononçant à 53,4% pour le « non », mais Pat Cox est un spécialiste du « re-vote » auquel il est encore et à nouveau toujours favorable.
 
Ainsi dans l’Irish Times du 26 août 2008, il déclarait :
« Les précédents danois et irlandais sur les traités de Maastricht et Nice, suggèrent que, là où il y a dans tous les membres sauf un, un consensus clair pour progresser, le poids du nombre prévaut et la charge de l’ajustement pèse sur ceux qui ne peuvent ou ne veulent ratifier. (…)
Un deuxième referendum est la seule voie de sortie, qu’il porte sur un texte proche du Traité de Lisbonne ou qu’il soit assorti d’opt out (de dérogations - ndlr). »

On croit bon de relever que le Mouvement Européen précise sur son site (à l’entrée « historique », fin de page) :
« L’objectif du mouvement Européen est l’établissement d’une Union Européenne fédérale. Pour y arriver le Mouvement Européen a toujours placé le citoyen au coeur de la construction communautaire. »
Sans doute, mais uniquement quand il vote oui !

Plus  sérieusement, au lieu de pratiquer l’acharnement éclairé, de telles élites ne pourraient-elles réfléchir sur le fait de savoir si l’on a réellement besoin en 2008 du Traité globalement de facture ultra-libérale qu’elles nous ont mitonné depuis 2003, alors que cette vision du monde s’effondre de partout aujourd’hui ; dites ?
En clair, la réalité actuelle des faits et la nécessité de régulation économique et politique que révèle la crise structurelle ne sont-elles pas l’opposition politique la plus radicale qui s’oppose au Traité de Lisbonne en 2008 et qui le rendent … ringard et dangereux. Soyons pragmatique, mais jusqu’au bout !
De plus, posons nous aussi la question : Quelle légitimité aura l’Union Européenne quand elle interviendra dans le monde pour faire respecter les règles de la démocratie si elle pratique elle-même le déni de démocratie ?
Pour se tirer une balle dans le pied, l’Union Européenne démocratique a-t-elle besoin de ces « tireurs d’élite » ?

Outre le fait d’être Président du Mouvement Européen, Pat Cox est également membre du Conseil d’administration de l’International Crisis Group (ICG), un des poids lourds de l’analyse en matière de relations internationales, à la fois think tank d’élite et réseau d’influence, qui se définit selon son site comme « une organisation non gouvernementale indépendante à but non lucratif employant plus de 130 personnes réparties sur cinq continents. Ceux-ci conçoivent des analyses de terrain et un plaidoyer de haut niveau dans un but de prévention et de résolution des conflits. ».

Cette organisation, créée en 1995 avec la participation active de Michel Rocard (FoE, et aujourd’hui toujours conseiller de l’ICG) et Jacques Delors, est présidée par Gareth Evans (Ancien Ministre des affaires étrangères d’Australie) et assisté de deux co-présidents : Lord Patten of Barnes (Ex Commissaire européen aux relations extérieures, ex et dernier gouverneur de Hong Kong, ECFR, Ditchley found et ACED) et de Thomas R Pickering (Ancien ambassadeur des Etats-Unis (Nations Unies, Russie, Inde, Israël, Gordanie, Salvador et Nigeria, membre de l’International Institute of Strategic Studies (IISS), du Council on Foreign Relation (CFR) et Vice Président de Hills & Company. Suit un Comité de direction de 9 membres chapeautant un Conseil d’administration de 35 personnes, dont bien sûr on trouvera la composition complète sur leur site.

Un staff où se côtoient des personnalités issues du monde politique, d’organisations multilatérales, d’entreprises transnationales, d’autres réseaux d’influence, pardon d’autres « organisations non gouvernementales indépendantes à but non lucratif » mais aussi des médias. Parmi elles, on retrouve : Georges Soros (au comité directeur, milliardaire et spéculateur, Président de l’Open Society, financeur et membre aussi de l’European Council on Foreign Relations/ECFR), Yoichi Funabashi ( journaliste au Asahi Shinbum), Christine Ockrent (journaliste, ECFR et Centre for European Reform/CER), Zbigniew Brzezinski (co fondateur de la Trilateral Commission, omniprésent dans nombre de réseaux), Weslay Clark (ancien secrétaire général de l’OTAN), Victor Chu (Chairman Eastern Investment Group), Uffe Ellemann-Jensen ( ancien Ministre des affaires étrangères du Danemark et administrateur de Friends of Europe), Joschka Fischer (ancien ministre des affaires étrangères d’Allemagne et ECFR), Carla Hills (ancienne secrétaire d’Etat des Etats-Unis), Leslie H. Gelb (Président émérite du Council on Foreign Relations), James V. Kimsey ( fondateur et président émérite d’AOL), Wim Kok (ancien premier ministre des Pays-Bas et administrateur de FoE), Ricardo Lagos (ancien Président du Chili), Fidel V. Ramos (ex président des Philippines ) ou encore Ernesto Zedillo (ancien président du Mexique, membre du conseil consultatif international du Council on Foreign Relations et membre du Group of Thirty (Groupe des Trente) – je conseille la visite de leur site).

La particularité de l’ICG est qu’il est un métissage d’une ONG, d’un think-tank et d’une organisation intergouvernementale. En effet l’ICG était financée en 2006 par 21 gouvernements (dont le ministère des affaires étrangères français) dont 19 européens à hauteur de 40%, par 15 fondations de couverture globale (dont Carnegie, Ford, Georges Soros/Open Society) à hauteur de 32 % et par une dernière famille regroupant d’autres fondations, des entreprises privées et des donateurs individuels pour 28%, parmi elle :  Rockefeller philanthropy advisors, Chevron, Citigroup, Goldman Sachs matching gift program, Crédit Suisse, Anglo-American Plc, Microsoft matching gift program.
Autant dire qu’ICG ne manque pas de fonds et permet une politique d’influence de grande envergure.

Sous le titre « International Crisis Group : un think tank pour influencer la politique étrangère de l’Europe » Martine Royo et Stephen Boucher consacrent un encart à cette organisation dans leur ouvrage richement documenté « Les think tanks, cerveaux de la guerre des idées » - préfacé par Pascal Lamy, je le rappelle. Dans ce passage, ils indiquent :
« Il (l’ICG) consacre 70 % de ses forces à la recherche et environ 30% au travail d’influence et de mobilisation des politiques quand une crise menace d’éclater :
« En 2005, nous avons contribué à éviter la guerre entre l’Ethiopie et l’Erythrée, notamment en empêchant l’Union Africaine d’envoyer des troupes à Addis-Abeba » rappelle Alain Deletroz, vice-président de l’ICG. Avec cinquante correspondants dans le monde entier, le groupe est totalement international.
Preuve de son influence : en septembre 2005 à Paris, Javier Solana, haut représentant de l’Union Européenne pour la politique étrangère et de sécurité commune a fait un discours qui passait sous silence les excès du gouvernement ouzbek, lequel venait de faire tirer sur la population. L’ICG a obtenu qu’il menace de dénoncer l’accord de coopération passé par l’Union européenne avec Tachkent. »
Martine Royo et Stephen Boucher – Les think tanks, cerveaux de la guerre des idées – Ed Kiron / Le Félin – 2006 - p. 57, 58.

Pour peu que les informations contenues dans ce passage soient exactes – n’ayant aucune preuve d’en douter – il est incontestable d’une part que l’étude de ce type d’organisation est absolument indispensable afin de comprendre les mécanismes furtifs de la géopolitique et que d’autre part (considérant que Mr Solana est membre de Friends of Europe) les réseaux d’influence et les membres qui les composent s’influencent aussi entre eux selon une logique qui n’est pas conspirationniste – mais croisée et complexe.
Je le répète un réseau d’influence est aussi un champ de relations, soumis à des influences soit internes (l’unanimité n’y existe pas comme dans une secte, même s’il y a accord sur une politique générale de l’organisation qui permet à la fois son identité et son existence structurelle) soit externes, car un individu appartenant à un réseau d’influence, voire même plusieurs, ou le réseau lui-même, peuvent être la cible d’autres réseaux d’influence. En clair même si l’on ne peut nier une sorte de consensus sur des préceptes très libéraux parmi nombre de ces réseaux gravitant autour des institutions européennes, analyser leurs activités selon le principe d’un complot (par exemple néolibéral) établit de longue date et unificateur, me semble extrêmement réducteur et dangereux sur le plan de la connaissance et sur le plan politique. En effet on remplace alors la connaissance par une pseudo-connaissance facilement traduisible en une gnose-vulgate de militant, vouée à l’échec politique car elle détermine alors un adversaire idéal qui ne correspond pas à « l’adversaire » réel dont la force primordiale repose dans l’obscurantisme et dans l’opacité qu’il entretient sur sa propre existence et sur ses activités dans cet espace géopolitique furtif et complexe que je m’efforce de mettre à jour et de décrire.
De la sorte amis altermondialistes, il se pourrait bien que notre pire adversaire soit notre propre conception politique des choses, trop souvent diabolisante et sous l’emprise du « complot néolibéral ».
La « causalité diabolique » en histoire est toujours l’ennemie de la raison, en politique elle est l’ennemie de la réussite.
Que des stratégies coordonnées existent dans cet espace géopolitique furtif que je m’efforce de comprendre, certes – et je crois en avoir fait démonstration, notamment par rapport aux conditions d’écriture du TCE puis du traité de Lisbonne. Mais croire que cet espace a été sculpté de main de maître par je ne sais trop quel « génie » est une théorie qui n’est pas tenable car la grande complexité de cet espace géopolitique vient du fait  qu’il est une interrelation entre la construction progressive de l’espace géopolitique mondial multilatéral –et donc d’une socio anthropologie particulière de nos élites et d’une intention idéologique (néo/ultralibérale) qui s’est elle-même progressivement fédérée en théorie et solidifiée en idéologie. Ces deux plans : le plan structurel et le plan intentionnel s’enrichissant l’un l’autre, boostés par l’essor de la mondialisation économique et géostratégique, de leurs enjeux et des intérêts financiers sans cesse plus croissants qu’ils revêtent pour les firmes privées à la politique sans cesse plus mondialisée.
Le rôle de ces firmes n’est donc pas mince à mes yeux dans la construction de cet espace stratégique asymétrique où la coopération est « libre et non faussée » par le citoyen, mais donner à ces firmes le pouvoir d’un génie omniscient, c’est passer à côté de la véritable nature de cet espace d’influence qui est faite aussi de concurrence entre les membres de ces réseaux, mais aussi des réseaux entre eux. De fait, les stratégies qui s’y déploient usent grandement d’expérimentations même si bien sûr elles peuvent avoir d’une part des objectifs précis qui leur donnent une portée dans le temps mais aussi être des « réseaux de réseaux »  ce qui leur donne des opportunités de ressources humaines, qui sont autant de troupes certes pour mettre en œuvre une stratégie, mais aussi autant d’acteurs potentiels pour remédier à ses ratages. Le processus de ratification du TCE puis celui du Traité de Lisbonne sont d’ailleurs assez exhaustifs quant à cette façon de fonctionner par remédiassions empiriques, plus que par planification maîtrisée.
En son temps, le philosophe Gilles Deleuze avait mis en garde d’ailleurs contre le type d’approche conspirationniste :

« L’Etat le plus centralisé n’est pas du tout maître de ses plans, lui aussi est expérimentateur, il fait des injections, il n’arrive pas à prévoir quoi que ce soit : les économistes d’Etat se déclarent incapables de prévoir l’augmentation d’une masse monétaire. La politique américaine est bien forcée de procéder par injections empiriques, pas du tout selon par programmes apodictiques. Quel jeu triste et truqué jouent ceux qui parlent d’un Maître suprêmement malin, pour présenter d’eux-mêmes l’image de penseurs rigoureux, incorruptibles et « pessimistes » ? C’est sur les lignes différentes d’agencements complexes que les pouvoirs mènent leurs expérimentations, mais que se lèvent aussi des expérimentateurs d’une autre sorte, déjouant les prévisions, traçant des lignes de fuite actives, cherchant le conjugaison de ces lignes, précipitant leur vitesse ou la ralentissant, créant par morceau le plan de consistance, avec une machine de guerre qui mesurerait à chaque pas les dangers qu’elle rencontre. »
Gilles Deleuze et Claire Parnet – Dialogues – Ed Flammarion – 1977 – p. 174,175.

S’il me faut prendre parti, je me réclame de ce genre d’«expérimentateurs d’une autre sorte» qu’évoquait  Gilles Deleuze en 1977. Ce site est  donc une machine de guerre, une de celles dont le principe premier n’est pas la volonté de détruire mais la volonté de faire émerger et de créer de nouveaux agencements et de nouvelles lignes de devenir.
- Fin de la digression –

Pour finir sur Pat Cox, on précisera qu’il est  aussi l’un des 50 membres du très récent et très élitiste European Council on Foreign Relations (voir plus haut) créé en 2007, dont les fonds sont largement fournis par Georges Soros qui en est lui-même membre. Pat Cox donc à l’ECFR, tout comme Jean Luc Dehaene et Pascal Lamy, soit trois membres du praesidium (trois vice présidents) de Friends of Europe.

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Peter Mandelson, « le Prince des ténèbres »

Le « Commissaire Mandelson » comme l’appelait Jacques Chirac, était encore récemment  responsable du Commerce extérieur à la Commission Européenne,  poste auquel il a remplacé Pascal Lamy quand celui-ci est parti à Genève pour assurer la direction de l’OMC. Pascal Lamy qui avait lui-même remplacé Sir Leon Brittan à ce même poste.
Comme Pascal Lamy, Peter Mandelson incarne un socialisme d’ouverture, de type social libéral, tellement socialiste que même Jacques Chirac puis Nicolas Sarkozy ont eu à se plaindre de sa politique libérale quand il la menait au Commerce extérieur de l’Union Européenne. C’est dire.

Après des études de sciences politiques, de philosophie et d’économie à l’Université d’Oxford, il est élu au conseil municipal de Lambeth en 1979, qu’il quitte en 1982, en désaccord avec les autres membres.
Il se dirige alors vers le journalisme et la communication pour devenir producteur pour London Weekend Television et devient Directeur de la Communication du parti Travailliste en 1985 pour lequel il s’occupera de la campagne des élections législatives de 1987 qui se soldera par un échec pour le parti travailliste. Il y gagne toutefois dans la presse britannique le surnom de « Prince des ténèbres »
En 1990, il est élu à la Chambre des communes et en 1994 il joue un rôle important dans la campagne de Tony Blair qu’il aide à prendre la tête du parti et devient son conseiller. Il devient directeur de sa campagne qui l’amènera à la tête du pouvoir en 1997.
Il est alors nommé Ministre sans portefeuille, chargé du projet du Dôme du Millénaire.
En 1998, il rejoint le cabinet Blair comme Secrétaire d’Etat au Commerce et à l’Industrie mais le 23 décembre 1998, il est contraint à la démission après qu’ait été révélé qu’il avait touché un prêt immobilier occulte de 373 000 livres sterling venant d’un de ses collègues (Geoffrey Robinson) au gouvernement.
En 1999, il revient au gouvernement comme Secrétaire d’Etat à l’Irlande du Nord.
En 2001, il est alors pris dans un nouveau scandale, relatif au Dôme du millénaire dont il a dû assurer la gestion des travaux ce qui lui avait valu le surnom de « Ministre du Dôme ». Il s’agissait d’un projet pharaonique confié à l’architecte Richard Rogers et à Zaha Hadid pour les décorations intérieures, consistant en la construction d’un dôme géant de près d’un kilomètre de circonférence devant abriter à Greenwich nombre d’expositions financées par des entreprises du Royaume-Uni sur le mode d’une sorte de « Futurosope temporaire » afin de servir de vitrine au passage au XXIe siècle. Dès l’origine la manifestation ne devait durer qu’un an pour un coût total pour l’Etat qui s’est élevé à près d’un demi-milliard d’euros, un peu cher à la semaine ! Ce qui a amorcé pratiquement dès l’origine, sinon un premier scandale, une sérieuse controverse ; d’autant qu’aujourd’hui il ne sert qu’à accueillir des spectacles et manifestations sportives de dimension exceptionnelle, donc rares.
Mais le véritable scandale le concernant plus étroitement survint quand on apprit qu’en juin 1998 il avait personnellement intercédé auprès d’un fonctionnaire du ministère de l’Intérieur pour obtenir la nationalité britannique à deux frères indiens de la famille richissime Hinduja, famille qui était l’un des principaux soutiens financiers du projet Dôme. Il est alors une nouvelle fois contraint à la démission le 24 janvier 2001.
Il s’implique alors dans le développement du think tank/réseau d’influence : Policy Network dont il devient Président et dont il est aujourd’hui Président Honoraire. En 2004, il remplace Pascal Lamy à la Commission Européenne, en charge du Commerce extérieur.
Le 3 octobre 2008, il présente sa démission à José Manuel Barroso. En effet, relativement à la crise financière qui touche durement le Royaume-Uni, Gordon Brown (avec lequel il s’entend pourtant fort peu) procédant à un remaniement ministériel, le nomme Secrétaire d’Etat (ministre) au commerce.
Pour la petite histoire (de celle aussi qui fait aussi la grande), on remarquera que c’est la Baronne Catherine Ashton (New Labour, comme lui) qui l’a remplacé à la Commission Européenne après décision du Conseil le 6 octobre 2008. Auditionnée le 21 octobre devant le Parlement Européen, elle a été soumise au feu des questions des députés européens. Le site du Parlement dresse un résumé de cet échange tout en proposant une vidéo en ligne faisant reportage. On y constate que pour beaucoup elle y est questionnée notamment par des eurodéputés membres de Friends of Europe et du Transatlanatic Policy Network : Erika Mann, Jacez Saryusz-Wolski ou Robert Sturdy (entre autres), autant dire que le « feu » a été savamment entretenu. Il y apparaît une philosophie politique tout à fait dans la continuité socialo libérale de Peter Mandelson.
Ainsi sur la question relative a la crise économique actuelle, elle a répondu : « Je ne crois pas que la réponse à tous nos problèmes réside dans un retour sur l’ouverture actuelle de l’économie mondiale. Je pense qu’elle se trouve dans une nouvelle gestion de la mondialisation économique. »
N’est-ce pas là l’idée de tous nos dirigeants : Changer la gestion de la mondialisation sans changer la philosophie politique qui la gouverne.
   
Par ailleurs donc, Peter Mandelson est Président honoraire de Policy Network (PN), un réseau d’influence/think tank crée en 2000 à l’initiative de Tony Blair, Giuliano Amato (FoE), Gerhard Schröder et Goran Persson, afin de créer un socialisme dit de « troisième voie » procédant par la modernisation du centre gauche socialiste, tel que théorisé par le sociologue Anthony Giddens, ancien Président de la prestigieuse London School of Economics (LSE) et membre du directoire de Foreign Policy. Par ailleurs, c’est avec Roger Liddle (membre aussi de PN) que Peter Mandelson, en véritable « spin doctor » politique a donné toute substance et opérationnalité politique au concept de « troisième voie » en l’enchâssant dans le nouveau courant travailliste « New Labour ».  
Si l’on compte parmi ses membres plusieurs dirigeants de la britannique Fabian Society (voir « Dimension historique » sur notre site), PN collabore également à la réflexion sur le « socialisme du XXIe siècle » avec les Nouveaux Démocrates proches de Bill et Hillary Clinton aux Etats-Unis (notamment avec leur think tank : Progressive Policy Institute) et avec ceux de sensibilités semblables dans d’autres pays du monde.
Ainsi Policy Network est devenu le secrétariat permanent du Sommet des progressistes (Progressive Governance) rassemblant régulièrement chefs d’Etats, de gouvernement et leaders politiques de cette sensibilité socialiste là.
Policy Network peut-être donc être considéré comme un réseau important dans l’histoire de la construction du social libéralisme.

Policy Network est présidé par Lord Giles Radice (Pair du royaume de Grande Bretagne) et sa gouvernance reposait jusqu’en 2008 sur un bureau de 31 membres parmi lesquels : Giuliano Amato (FoE), Ron Asmus (directeur exécutif du German Marshall Fund), Marta Dassu (Directrice générale d’Aspen Italy), Lord Antony Giddens (LSE), Trinidad Jimenez (Secrétaire internationale du Parti Socialiste Espagnol), Roger Liddle, Will Marshall (Président du Progessive Policy Institute/USA), Alain Minc (AM conseil et ECFR), Mike Moore (ex secrétaire général de l’OMC), Poul Nyrup Rasmussen (Président du Parti Socialiste Européen), Maria Joao Rodrigues (Conseillère spéciale auprès de la Commission européenne), Dominique Strauss-Kahn ( FMI), Helle Torning-Schmitt (Chef du parti socialiste danois) ou encore Patrick Weill.
NB : Dernière minute, le bureau de Policy Network est en complet remaniement et donc la composition ci-dessus doit être arrêtée à septembre 2008.

Pour clore ce « portrait en réseau » de Peter Mandelson, on précisera qu’il est également membre du bureau des gouverneurs de la Ditchley Foundation, un puissant réseau d’influence britannique créé en 1958 et présidé par le très conservateur (et ex 1er Ministre) John Major. Autant dire que le socialisme «de troisième voie» de Peter Mandelson relève d’un bonheur qui se porte particulièrement large !
L’objectif de la transatlantique Ditchley fd. consiste à penser et à développer les relations du Royaume-Uni avec les Etats-Unis (mais aussi avec le Canada) sur le plan stratégique et économique dans le cadre des relations internationales. De fait, si son directoire comprend une grande majorité de personnalités britanniques panachées de quelques autres européens, il comprend aussi deux autres directoires plus restreints : l’un composé de personnalités des Etats-Unis, l’autre du Canada.
Cette organisation mériterait une analyse tout aussi poussée que celle de Friends of Europe, car tout en inaugurant historiquement la voie des réseaux transatlantiques en 1958 (à la suite du Bilderberg Group), ses activités d’ordre international ont concerné l’élargissement de  l’Union Européenne, le contrôle mondial de l’armement, l’euro, l’industrie de la Défense ou encore le conflit du Kosovo.
Toujours est-il que Peter Mandelson retrouve dans cette organisation trois autres dirigeants de Friends of Europe : Giuliano Amato (vice Président de la Convention européenne et Président de l’ACED/Groupe Amato qui a fourni en 2007 le Modèle de Nouveau Traité aboutissant au Traité de Lisbonne), John Bruton (Ex 1er Ministre d’Irlande, Membre du Praesidium de la Convention européenne et Chef de la Délégation de la Commission européenne à Washigton et membre du bureau des dirigeants de l’European Council on Foreign Relations) , et enfin John Monks (Secrétaire général de la Confédération Européenne des Syndicats, mais aussi membre du Mouvement Européen, de l’European Policy Centre et du Centre for European Reform, toutes organisations particulièrement ouvertes à une Europe sociale…).  

Friends of Europe dispose donc de par les compétences de Mr. Mandelson d’un excellent expert, connaissant parfaitement les arcanes du pouvoir du Royaume-Uni et les réseaux de la Commission européenne notamment dans le cadre du Commerce extérieur où il est rompu qui plus est aux négociations avec l’OMC, d’autant que ses talents ne s’arrêtent pas là : il est aussi un fin connaisseur de la culture et des structures du « socialisme de troisième voie » dont il est l’un des artisans majeurs. Les relations transatlantiques britanniques n’ont pas non plus grand secret pour lui. Au total un dirigeant de choix pour les Amis de l’Europe.   

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Javier Solana Madariaga : « l’expert en super fluidité »

Javier Solana entame d’abord une carrière universitaire dans le domaine des sciences, en physique plus particulièrement. Ses brillantes études commencent à l’Université de Complutense de Madrid où il obtient son diplôme en 1964. Etudes qu’il complète en Espagne (Haut conseil pour la Recherche scientifique), au Royaume-Uni puis aux Etats-Unis où il passe six années dans diverses universités. Tout en enseignant à l’Université de Chicago et à la Jolla en Californie, il obtient en 1968 son doctorat de Physique avec une thèse sur la super fluidité (état particulièrement exotique de la matière qui se révèle à l’échelle quantique) à l’Université de Virginie. Il y enseigne et y mène ses recherches jusqu’en 1971.
De retour en Espagne, après un poste de Maître de conférence à l’Université autonome de Madrid (UAM), il revient à l’Université de Complutense en 1975 pour y enseigner et publiera par la suite plus de 30 articles de recherches. Il encadre se dernière thèse de doctorat en 1990.

Sa carrière politique se construit en parallèle : il rejoint en 1964 le Parti Socialiste Espagnol (clandestin sous Franco), puis aux Etats-Unis rejoint la Lutte contre la guerre du Vietnam vers la fin des années 60. De retour en Espagne, il adhère à la coordination démocratique de Madrid en tant que représentant du Parti Socialiste Ouvrier Espagnol. En 1976 et pour cinq ans il est élu Secrétaire de la Commission exécutive fédérale et Secrétaire pour l’information et pour la presse. Il devient un proche puis un ami de Felipe Gonzales. En 1976 et en 1977, il représente le PSOE lors de l’Internationale Socialiste.
Il est élu au Parlement espagnol en 1977. Quand en 1982 le PSOE accède au pouvoir, il devient Ministre de la Culture (jusqu’en 1988), puis de 1988 à 1992, il devient Ministre de l’Education et des Sciences et enfin de 1992 à 1995 : Ministre des Affaires Etrangères, une fonction qui amorce un tournant dans sa carrière politique.

En effet, plutôt que de redresser le PSOE et de tenter d’en prendre la tête afin de le mener à la victoire en mars 1996, ce pourquoi il a toutes compétences et popularité, il se tourne alors vers une carrière internationale, au sein d’organisations multilatérales.
Ainsi de décembre 1995 à octobre 1999, il devient Secrétaire Général de l’OTAN, puis depuis cette même date, il enchaîne directement par des responsabilités à l’Union Européenne où il devient Secrétaire Général du Conseil de l’Union Européenne, et Haut représentant pour la Politique étrangère et de Sécurité Commune, fonctions qu’il exerce toujours aujourd’hui en 2008.

On fera remarquer que Javier Solana prend la direction de l’OTAN dans un climat triplement problématique. D’abord parce qu’il succède à Willy Claes contraint à la démission suite à une affaire de corruption, ensuite parce que Javier Solana était de longue date un adversaire de l’OTAN (il avait même rédigé un texte intitulé « 50 raisons de dire non à l’OTAN »). Mais, lorsqu’en 1982, le PSOE accède au pouvoir, l’Espagne intègre cette organisation militaire et stratégique transatlantique la même année et le parti doit revoir sa position et la clarifier. Ceci se formalisera par l’organisation d’un referendum sur le maintien de l’Espagne dans l’OTAN en 12 mars 1986 où le OUI l’emportera. La ligne du parti s’appuya alors sur l’idée que la politique de l’OTAN était désormais découplée de celle de la Guerre Froide, « non alignée » en quelque sorte. On laissera les connaisseurs débattre de la pertinence où de l’étrangeté d’une telle affirmation à cette date. Toujours est-il que cette position fût défendue par Javier Solana et qu’elle redora notoirement son blason transatlantique.
Le troisième aspect problématique lié à sa prise de fonction tient au fait qu’il a dû immédiatement prendre en charge les conflits dans les Balkans : Direction de l’Opération Joint Endeavour  avec les 60 000 hommes de l’IFOR (Force de Mise en Œuvre Internationale) remplacée par la SFOR, prouesses diplomatiques afin de finaliser les accords de Dayton, puis les opérations Joint Guard et enfin Joint Forge.
Enfin, de fin 1997 à juin 1998, il règle le conflit au Kosovo en engageant encore une fois les forces de l’OTAN.
De plus il a négocié l'Acte fondateur avec la Fédération de Russie, signé à Paris en mai 1997, qui établit un nouveau partenariat de coopération et de consultation avec la Russie et qui a mis officiellement fin aux rapports de guerre froide entre l’axe transatlantique et la Russie.
On notera par ailleurs que Javier Solana est également l’artisan deux mois plus tard d’un accord entre l’OTAN et l’Ukraine en juillet 1997 (moyennement apprécié par Moscou) et qu’il a été le créateur dès son entrée en fonction du CPEA (Conseil de partenariat euro-atlantique) comprenant les seize pays de l’OTAN et vingt huit pays partenaires afin de préparer l’élargissement de l’OTAN. Une organisation qui semble d’ailleurs en sommeil depuis quelques années, sans doute car fort peu goûtée par Vladimir Poutine.

Javier Solana a gagné incontestablement de son passage à l’OTAN la réputation d’un négociateur et d’un stratège hors du commun qui a su gérer au mieux la situation de guerre et de nettoyage ethnique dans l’ex Yougoslavie et à faire face et alternative à l’immobilisme et à l’impuissance des institutions européennes et de leurs Etats membres afin de gérer ce conflit fratricide et génocidaire au coeur de leur espace géopolitique, tout en n’exacerbant aucune susceptibilité.  
Autant dire que l’Union Européenne ne pouvait faire autrement que de recruter un tel talent qui, techniquement et intellectuellement, sur le terrain diplomatique force à l’admiration.

De fait il est immédiatement entré en fonction le 18 octobre 1999 en tant que Haut Représentant pour la Politique Etrangère et de Sécurité Commune (PESC) de l’Union Européenne et comme Secrétaire Général du Conseil de l’Union Européenne. Le 25 Novembre il devient aussi le Secrétaire Général de l’Union de l’Europe Occidentale (UEO), puis Chef de l’Agence Européenne de Défense (AED).
On comprend donc facilement que l’Union Européenne tienne particulièrement à conserver ce talent exceptionnel, mais qu’elle le fasse dans des termes qui violent les principes des droits élémentaires (de ceux que l’Union Européenne ambitionnait de se doter par la ratification du Traité Constitutionnel Européen) voilà qui n’est pas acceptable. En effet c’est avec surprise et malaise que j’ai pu lire le 20 juin 2006 à la toute fin du curriculum vitae de Javier Solana sur le site du Conseil de l’Union Européenne la mention suivante :
« Juillet 2004 : nommé pour un deuxième mandat de 5 ans au poste de Secrétaire général du Conseil de l'UE et Haut Représentant de l'UE pour la PESC. Il a également été convenu que M. Solana serait nommé Ministre des Affaires étrangères de l'UE à l'entrée en vigueur du traité constitutionnel pour l'Europe. »
Convenu ? Et par qui ? Comment est-ce possible, avant même que le Traité ne soit adopté ? D’où vient cette … « convention » ?

Car enfin, ce n’est pas ce que disait le Traité Constitutionnel Européen (TCE), fruit des travaux de la Convention Européenne. Traité dont l’avenir était encore incertain en juin 2006 : l’ACED / Groupe Amato n’a commencé ses travaux qu’en septembre 2006 pour élaborer le MNE/Modèle de Nouveau Traité. Le TCE restait donc toujours alors d’actualité et cette mention relative à la nomination de Javier Solana y faisait référence.
En effet le TCE, que tous citoyens (français, car cela n’a pas été le cas de ceux des autres Etats-membres de l’Union) nous avons eu entre les mains afin de le voter, signifiait dans son Article I-28.1 :

« Le Conseil Européen, statuant à la majorité qualifiée, avec l’accord du Président de la Commission,
nomme le ministre des affaires étrangères de l’Union. Le Conseil européen peut mettre fin à son mandat selon la même procédure. »

Mais où est-il indiqué qu’il est « convenu que » ? Une expression qui de surcroît n’a aucune place dans une procédure légale de nomination à une fonction de direction institutionnelle. Encore une fois, on voit bien apparaître là cette caractéristique regrettable de nos élites qui contournent quant à elles des textes de loi qu’elles ont elles-mêmes élaborés, selon une pratique de « convention de la combine » en lieu et place du mot et de la loi de la Convention officielle et légale.
Afin de prouver mes remarques et analyses précédentes, je livre ci-dessous deux documents :

1) La capture d’image du C.V. de Javier Solana sur le site du Conseil de l’UE                2) Le lien internet avec le C.V. de Javier Solana actuel, sur
tel que je l’ai découvert le 20 juin 2006.                                                                           ce même site, mais où la mention précédente a été supprimée !
(La mention fâcheuse, citée par mes soins figure en fin de ce document)

En effet cette mention (qui est restée plusieurs mois sur le site de l’Union) est aujourd’hui supprimée mais cela est-il dû à son caractère révoltant ou bien parce qu’au regard du Traité de Lisbonne son libellé n’est plus d’actualité*? On peut se le demander, on espère sans trop y croire que c’est pour la première raison et de toute façon on se demande comment et pourquoi une telle « chose » a pu être officiellement énoncée.
* En effet le Traité de Lisbonne ne reconnaît plus la fonction de « Ministre des affaires étrangères », mais celle de « Haut Responsable ».

Est-ce là chercher « la petite bête » ? Pour ma part je ne le crois pas, sans reprendre l’adage selon lequel « le diable se cache derrière des détails »,
je crois qu’au contraire - et c’est la mission de ce site – il faille aujourd’hui questionner et éclairer le fonctionnement actuel de l’Union Européenne afin d’en faire apparaître les incohérences démocratiques qu’il convient d’expurger afin qu’elle devienne ce que nous voulons tous : une Union Démocratique Européenne, où le principe de l’Esprit des Lois restauré bannisse celui de la « convention » des élites, de leurs réseaux et de leurs petits arrangements.
De ces modes de fonctionnement furtifs, La Madariaga foundation dont Javier Solana est Président est assez symbolique. On notera déjà que son CV officiel sur le site de l’Union (voir ci-dessus) ne fait pas mention de cette activité de son Haut représentant à la PESC et Secrétaire général du Conseil de l’Union.

La Fondation Madariaga (du non d’un diplomate et intellectuel illustre : Salvador de Madariaga (1886-1978, proche parent de Javier Solana) a été créée en 1998 par l’Alumni Association Collège d’Europe (9000 membres), elle-même émanation du Collège d’Europe fondé en 1949 sur une idée de Salvador  de Madariaga et avec l’appui décisif du Mouvement Européen, en effet l’un de ses leaders : Hendrik Brugmans fût le 1er recteur du Collège (mandat : 1950/1972).  Jean Luc Dehaene (Praesidium de Friends of Europe) est aujourd’hui le Président du Collège d’Europe, et tout nouveau Président de la banque franco-belge DEXIA (récemment « nationalisée »), il est aussi (et entre autres) vice Président de la Fondation Madariaga qui compte par ailleurs un autre membre illustre de FoE dans son directoire : Le baron Daniel Janssen (voir plus haut). Madariaga qui affiche par ailleurs dès la page d’accueil de son site un partenariat renforcé avec Friends of Europe, puisque l’on peut y lire en première page :

“The Madariaga European Foundation has  initiated a partnership with Friends of Europe
in order to launch a reflection on the political role of Foundations.”  Soit:
“La Fondation Européenne Madariaga a initié un partenariat avec Friends of Europe
afin de lancer une réflexion sur le rôle politique des Fondations.* »

* Au moins c’est dit franchement pour qui en douterait encore.

Et de fait Madariaga affiche sur son site un partenariat avec 18 fondations majeures et deux institutions:
Bank of Sweden Tercentenary Foundation, Barents Institute, Bernheim foundation, Café Babel, Charles Stewart Mott foundation, College of Europe, College of Europe Alumni Association, Compagnia di San Paolo, Crisis Management Initiative, EastWest Institute, European Union Institutions (Parlement, Commission, Conseil), Europe’s World, Evens foundation, Folke Bernadotte Academy, Ford Foundation, French permanent representation to the EU ( Représentation française permanente auprès de l’Union Européenne), Leuven Centre for Global Governence Studies, Norwegian Barents Secretariat, Oriente foundation, et enfin Toledo International Centre for Peace.
On remarquera donc dans ce plateau de partenaires philanthropiques la cohabitation des institutions européennes et de la représentation française à l’UE avec nombre de  ces fondations, émanations d’acteurs économiques majeurs et financés par eux (Banque Suisse, Ford, Compagnia di San Paolo : acteur financier majeur en Italie et par ailleurs partenaire privilégié de l’European Policy Centre, présidé par Peter Sutherland et que nous retrouverons plus bas).
Un vertige au passage : qui connaît dans le menu l’action de ces différentes fondations et de leur rôle politique ? Décidément il nous reste beaucoup à faire en matière de citoyenneté éclairée, c'est-à-dire en matière d’étude géopolitique et scientifique de toutes ces officines.
Mais quel est donc l’objet, la mission que se donne la fondation Madariaga, réseau de fondations, qui ne manque sans doute pas de fonds et qui, comme nous allons le voir, est habile à en lever d’autres.

L’objet de la fondation a changé depuis sa création en 1998, alors qu’à l’origine elle disait se concentrer sur la prévention des conflits et des problèmes de santé, c’est davantage sur ce premier aspect qu’elle s’est concentrée au point que le second en soit devenu très marginal, voire absent, ainsi en 2008 elle définit ainsi sa mission sur son site:
“The Madariaga – College of Europe Foundation is dedicated to promoting original thinking on the role of the European Union in an era of global change, engaging citizens and international partners in a creative debate on the issues that shape Europe’s future. Through research and action, the Foundation pursues a three-fold mission of challenging the citizen, empowering Europe, and preventing conflict.”  Soit :
« La Madariaga – Collège d’Europe Fondation est dédiée à promouvoir une réflexion originale sur le rôle de Union Européenne à l’ère d’un changement global, engageant des citoyens et des partenaires internationaux dans un débat créatif sur les problèmes que pose le futur de l’Europe. Au travers de recherches et d’actions, la fondation poursuit une trentaine de missions de stimulation citoyenne, de renforcement de l’Europe et de prévention des conflits. »
Alors que nous avons vu la composition des 20 partenaires internationaux de Madariaga fd., celle de son directoire, tout en permettant d’en envisager d’autres, nous renseigne aussi sur les « citoyens » qui dirigeant l’organisation « s’engagent dans un débat créatif ».
L’équipe dirigeante est composée de 20 personnalités, dont les fonctions se répartissant comme suit sous la présidence de Javier Solana Madariaga :
Tout d’abord, un Comité exécutif composé de six membres et présidé par Jean-Luc Dehaene (rappelons qu’il est Sénateur et ex 1er Ministre belge, membre du Praesidium de Friends of Europe, Président du Collège d’Europe, Ex vice président de la Convention européenne, ex membre du Groupe Amato/ACED, Ad. d’Interbrew, Corona-Lotus, Umicore, Telindus, Domo, Seghers, Better Technology group et tout nouveau Président de DEXIA, depuis oct. 2008 ; il est aussi vice Président de la Fondation Madariaga.

Les 6 autres membres se répartissent comme suit : Trésorier (Dan Brändström/Ancien directeur exécutif de Bank of Sweden Tercentenary foundation, Directeur Exécutif (Pierre Defraigne / ancien directeur d’Eur-IFRI, Institut Français de Recherche Internationale) et 3 membres : Luc Coene (vice Gouverneur de la Banque de Belgique), Paul Delaret (Recteur du Collège d’Europe) et Fabien Durand (Président Alumni Association Collège d’Europe) et enfin Nicolas Pascual de la Parte qui y représente Javier Solana.

Le Bureau des dirigeants est lui composé, outre les membres déjà cités, de : Michel Bourges Maunoury (Alumni), Pierre Caspar (Conservatoire des arts et métiers et ex Collège d’Europe), Dario Disegni (Chef des affaires Culturelles et des relations institutionnelles de la Compagnia di San Paolo), Fabien Durand (Direction Générale Commission Européenne), Corinne Evens (Présidente Evens Fondation), Alan Forrest (Directeur honoraire du Conseil de l’Union Européenne), Daniel Janssen (Président honoraire de Solvay, Praesidium de Friends of Europe, Commission Trilatérale, etc…), Craig Kennedy (Président du German Marshall Fund of the United States), Eneko Landaburu (Direction générale aux relations extérieurs/Commission européenne), Jo Leinen (membre du Parlement européen et… du Transatlantic Policy Network et vice président du Mouvement Européen), Giussepe Massanglioli (Directeur du Secrétariat général de la Commission européenne), Carlos Monjardino (Président de la fondation Oriente), John Wyn Owens (Président de l’University of Wales Institute/R.U.) et enfin William S. White (président de la Charles Stewart Mott foundation/USA).

Un directoire donc de grande qualité qui contribue au « dynamisme de l’Union Européenne », capable d’analyses tout à fait intéressantes (d’autres moins), et dont certaines rejoignent même des préoccupations centrales de ce site, notamment par rapport à la mise à l’écart du citoyen dans le processus de ratification des traités institutionnels européens.
Tel cet article de Pierre Defraigne (directeur de Madariaga et Directeur général honoraire de la Commission européenne) et intitulé : « Vers une Europe a-citoyenne ? », publié sur le site de Madariaga, et que je reporte ci-dessous :

Article de Pierre Defraigne : « Vers une Europe a-citoyenne ? »

Pierre Defraigne a été chef de cabinet d’Etienne Davignon (quand il était vice-président de la Commission Européenne), puis de Pascal Lamy, il a été aussi le Directeur d’Eur-IFRI (2005 / 2008), ce qui ne l’empêche pas de se poser des questions salutaires, me semble-t-il.
Cet article illustre aussi combien les réseaux d’influence (ici européens) ne sauraient être réduits à des milieux homogènes composés d’élites qui sortiraient toutes du même moule néolibéral et qui auraient pris en grippe les citoyens européens ; même si l’on ne peut que regretter que de telles prises de conscience n’aient pas été effectuées plus tôt et que ce soit face à l’enlisement actuel qu’elles sont énoncées. Peut être pour cela aurait-il fallu écouter un peu plus par exemple les arguments du « non » de progrès en France (dont  P. Defraigne reprend bon nombre) plutôt que de les ranger obtusément dans la catégorie des extrémismes et autres « ringardises ».
La crise institutionnelle européenne aurait-elle les mêmes effets politiquement révélateurs que la crise financière et économique en ce qu’elles génèreraient toutes deux une prise de conscience des élites ? L’exemple des remédiassions politiques à l’effondrement bancaire actuel pousse à être modeste en la matière et à réfléchir sur les grandes intentions  « de gauche »  proclamées haut et fort par le Droite dans un élan qui se dit pragmatique, alors qu’il n’est qu’un habillage communicant qui mène strictement à l’inverse dans un décorum rose et parfumé.

Reste une question que permet de poser la fondation Madariaga, question que l’on se pose fatalement face aux agissements des réseaux d’influence : Sont-ils tels qu’ils sont affichés et présentés sur la partie publique de leurs sites internet ou bien leurs activités correspondent-elles à des dispositifs et à des enjeux beaucoup plus furtifs ?
 On a déjà vu en étudiant le Transatlantic Policy Network que bien que leur site n’affiche pas clairement l’objectif d’un marché transatlantique sans barrière, celui-ci était de fait leur préoccupation centrale et dont les ratifications du Traité Constitutionnel Européen, puis du Traité de Lisbonne, étaient déterminantes dans cette stratégie transatlantique, dans la mesure où l’un puis l’autre contribuaient (notamment sur les aspects économiques) à mettre en synchronisme l’économie de l’Union et la gestion de ses  services publics avec ceux des Etats-Unis ; et c’est pour cela que le TPN s’est particulièrement investi dans les deux processus de ratification. TPN qui compte par ailleurs 11 membres parmi le directoire de FoE, soit près de 20 %. Quant à la place de FoE dans ce processus, il est présent avec  une participation de 50% (6 membres sur 12) dans le Praesidium de la Convention Européenne (dont les deux vice présidents de la Convention) et de 36 % dans le Groupe Amato (Comité Avancé pour une Démocratie Européenne-ACED) qui a mis en route le traité de Lisbonne. Apparaissent donc des interconnexions structurelles dans tout cet ensemble. Le fruit du hasard ? La signature d’un microcosme clôt sur lui-même et où fatalement on retrouverait souvent les mêmes personnalités en divers endroits de leur réseau relationnel ? Ou bien faut-il voir là une autre signature : celle de liens plus intimes et relatifs à la mise en place de stratégies opérationnelles collectives ?
Pour ce qui est du hasard, convenons qu’il ferait alors trop bien les choses. Je crois plutôt qu’il faille chercher les explications de tels assemblages dans un « effet de bocal en réseaux » fournissant alors toutes opportunités de stratégies orientées qui y sont alors décidées et qui s’y spécifient de façon discrète et furtive, et où le citoyen devient l’étranger sinon le problème. De fait, l’histoire des réseaux d’influence qui gravitent autour/dans l’Union Européenne (l’Archipel européen), c’est un peu l’histoire de la construction de l’Europe a-citoyenne dont Pierre Defraigne faisait l’analyse critique de son actualité (cf plus haut). Mais c’est une histoire aussi dans le construit de laquelle se dilue la distinction entre les contours de la structure réseau d’influence et ceux des institutions européennes. Aventure historique dans laquelle de facto se crée un nouveau mode de gouvernance intégrée, que j’appelle Démocratie corruptive, car ce nouveau genre de régime politique trouve l’un de ses principes moteurs essentiels dans la dégénérescence de la substance démocratique  et notamment du principe de séparation des pouvoirs publics et privés, par le jeu des pouvoirs discrets des réseaux d’influence. « Tous pouvoirs confondus » (pour reprendre le titre de l’ouvrage remarquable de Geoffrey Geuens), devient alors la devise à voix basse d’un tel nouveau genre de régime politique en formation.

En guise de conclusion sur Madariaga, et afin de montrer combien la nature pleine et entière de ces réseaux d’influence (lobbies, think tanks, fondations, etc…) nous échappent encore et que pourtant elles revêtent une importance géopolitique qui est loin d’être négligeable, je voudrais proposer à analyse la lecture d’un document saisi en 2006 sur le site internet de l’Eurasia Foundation :

Document relatif à l’acte inaugural de la création en 2004 de la New Eurasia foundation (NEF), fruit d’une initiative conjointe de
l’Eurasia fd. / USA, de Madariaga fd /UE, et de Dynasty fd /Russie.

Document référence sur l’acte inaugural de la New Eurasian Foundation                  Traduction du document en français

On laissera à l’internaute le soin d’explorer les sites internet de ces quatre organisations, afin d’apprécier l’objet et la mission de chacune d’elle.
Toujours est-il qu’à la lecture de ce document « prélevé à la source », on ne peut nier plusieurs choses :
1) Que ces fondations et think tanks fonctionnent en réseaux coopératifs (20 fondations majeures) et stratégiques.
2) Que sur ce mode, elles peuvent s’allier pour créer d’autres organisations (ici la NEF, émanation d’Eurasia fd., de Madariga fd. et de Dynasty fd.).
3) Que sur le plan géopolitique, leurs politiques peuvent s’organiser selon des logiques intercontinentales (ici : Etats-Unis, Europe, Russie)
4) Que des gouvernements (ici de l’Union européenne et des Etats-Unis) collaborent à ce type de montage.
5) Que des fonds très conséquents (ici « 50 millions de dollars, pour commencer ») sont levés par ces fondations privées afin de finaliser de tels projets dont la nature et l’objet général ne sont même pas définis dans ce communiqué officiel.
6) Que, de fait, on a donc affaire à la construction d’espaces géopolitiques complexes. Espaces qui s’organisent en réseaux coopératifs et où s’enchevêtrent discrètement organisations privées (financées par des poids lourds de l’économie mondiale) et représentants d’institutions politiques.
7) Que nous souffrons à l’égard de tels « montages » et des politiques qu’ils déterminent d’un double déficit : scientifique et démocratique, qui renvoie à deux questions :
a) Quelle appréciation intellectuelle avons-nous de ces politiques complexes, ne devraient-elles pas être aussi l’objet de la science géopolitique ?
b) En l’absence, quelle prise peut avoir le citoyen par rapport à ce type de politique dont il ne lui est jamais rendu compte ? De fait, on est là dans le cadre de politiques « a-citoyennes » (pour reprendre l’expression de Pierre Defraigne), c'est-à-dire de politiques mises en œuvre par des élites et des experts dont les réseaux fonctionnant en vase clos, ignorent le citoyen de base et l’exigence démocratique.

Pour conclure sur Javier Solana de Madariaga, Secrétaire Général du Conseil de l’Union Européenne, on précisera qu’il est donc un atout maître pour Friends of Europe, disposant de connaissances approfondies des relations internationales que ce soit en tant qu’ex président de l’OTAN (qu’il a eu à administrer dans des conditions particulièrement difficiles) ou dans ses fonctions actuelles de Haut représentant de la Politique Etrangère et de Sécurité Commune de l’Union Européennes. Toutes fonctions dans lesquelles il a fait preuve d’un talent de négociateur hors pair (que l’on soit d’accord ou pas avec les politiques qu’il y a mené).
Enfin, de par ses activités en tant que Président de la Fondation Madariaga, Friends of Europe dispose aussi d’un excellent expert de la géopolitique furtive et de ses réseaux, qu’elle s’organise à partir de fondations ou à des niveaux où sont entrelacés pouvoirs des Etats, des organisations multilatérales, des firmes globales et de leurs organisations discrètes pour dessiner une espace politique tout en…superfluidité.

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Erika  Mann : une élue du « parlement européen des réseaux »

Erika Mann est une europarlementaire appartenant au groupe socialiste (PSE/Parti Socialiste Européen). Elle est la seule parmi les 10 députés européen membres de Friends of Europe à appartenir aussi à trois autres réseaux, poids lourds de l’influence européenne : le Transatlantic Policy Network (TPN / 40 firmes), le Kangaroo Group (K.Gr / 56 firmes) et l’European Policy Centre (EPC / 89 firmes).
Si son appartenance au TPN et au K.Gr. est bien notifiée sur sa fiche personnelle, document officiel de l’Union Européenne renseigné pour chaque député, en revanche ses fonctions à FoE et à l’EPC ont été omises, comme c’est souvent le cas dans ce genre de documents qui sont pourtant des éléments de transparence importants : c’est pour cela qu’ils existent !
Encore une fois : comment se fait-il que des représentants élus fassent partie d’organisations financées par des entreprises privées (parmi les plus importantes) ? Pourquoi cette situation potentielle de conflit d’intérêt n’est-elle l’objet d’aucun encadrement de surveillance et d’aucun encadrement législatif. Le registre des lobbies ? Pour l’heure, son renseignement est encore facultatif. Trouve-t-on les noms des députés-membres de FoE, du TPN ou du K.gr dans le registre des lobbies du parlement ? Bien sûr que non, puisqu’ils sont eux-mêmes membres du Parlement européen.

On voit donc que le traitement de la question du lobbying et de l’influence est une question beaucoup plus complexe que celle qui nous est présentée. Il ne s’agit pas simplement de réguler et de rendre transparentes des démarches de « groupes d’intérêt » venant de l’extérieur mais aussi de pourchasser des pratiques collusives, potentiellement porteuses de conflits d’intérêts qui se sont développées au sein des institutions européennes.
Autrement dit, il s’agit aussi de régler la question de ce que j’appelle l’influence intégrée.
Influence intégrée qui pose une autre question : celle de la limite identitaire qui séparerait le « groupe d’intérêt » de l’institution-cible (ici le parlement européen), frontière dont l’effacement inaugure un nouveau mode de gouvernance : une gouvernance collusive.

Il est fondamental à mes yeux que TOUTES ces questions soient réglées avant les élections européennes de 2009 afin que l’on puisse élire nos députés dans des conditions d’éthique électorale et de transparence optimales.

Ce chantier est essentiel, nous nous devons ce « courage  qui nous manque »si nous voulons une Europe démocratique indépendante des intérêts privés et de leurs appétits. Voulons-nous cela pour nous-même et pour les générations futures ?

On peut bien sûr s’efforcer de botter en touche en prétextant qu’une situation potentiellement porteuse de conflits d’intérêts n’est pas une situation effective de conflit d’intérêt. Soit, mais comment alors expliquer que nombre de députés européens membres du TPN, dont l’objet est la création d’un marché unique transalantique, soient aussi rapporteurs quant aux résolutions tendant à créer un marché transatlantique sans barrière ? Il s’agit là d’Elmar Brok en 2004, Hannes Swoboda en 2005, Erika Mann en 2006 et Joseph Daul en 2007.
Au nom de quoi devons-nous accepter qu’alors que le TPN ne représente que 9,5 % des effectifs du Parlement européen, le président de cette institution démocratiquement élue (Hans-Gert Poettering) soit aussi membre du TPN, tout comme Jonathan Evans (président du Dialogue Transatlantique des législateurs, émanation du parlement européen) et l’un de son co-chairman également (Mr Jacek Saryusz-Wolski, de surcroît membre du bureau des dirigeants de FoE).
Au nom de quoi devons-nous accepter que les deux seuls représentants du Parlement européen au sein du Praesidium de la Convention étaient tous les deux membres du TPN (Mr Klaus Hansch et Mr Inigo Mendez de Vigo) et que ce dernier ait été le seul dans cette fonction au sein de l’ACED/groupe Amato, chargé d’un donner une feuille de route à la Conférence Inter Gouvernementale ayant abouti au Traité de Lisbonne. Praesidium de la Convention et Groupe Amato qui comptaient aussi une forte proportion de membres de Friends of Europe (50% dans le premier et 36% dans le second).
Au nom de quoi devons nous accepter que sur les quatre représentants du Parlement Européen à la Conférence Intergouvernementale de Lisbonne (2007), trois fassent partie du Transatlantic Policy Network : Hans-Gert Poettering (Président du Parlement), Enrique Baron Crespo et Elmar Brok (Eurodéputés).

Oui, au nom de quoi devons-nous accepter tout cela ? Si ce n’est au nom d’une « science politique » accomplie en toute discrétion et qui n’ose ni dire ni son nom, ni révéler sa substance et qui nous fait basculer silencieusement dans un nouveau genre de régime politique inconnu à ce jour.  

Erika Mann, au fond, est au centre de toutes ces interrogations, ainsi au Groupe Kangourou ( 56 firmes globales membres) présidé par Karl Von Wogau (Président de la Commission du Parlement Européen « Sécurité et Défense », alors qu’AVIO, DASSAULT Aviation, DIEHL VA SYSTEME, EADS, EUROCOPTER, MBDA France, RHEINMETALL DETEC, SAAB, SAFRAN Group et THALES sont membres du Kangaroo Group), Erika Mann donc fait partie en 2008 d’un staff de 14 députés européens, cœur parlementaire d’un directoire de 32 membres qui comprend également 4 personnalités de l’UE autres que du Parlement et enfin 15 membres issus de l’entreprise (corporate sector).  
Dans ce groupe parlementaire du Groupe Kangourou on en retrouve 9 du TPN (64%, soit près des 2/3), ce sont outre K. Von Wogau (PPE-DE) et Erika Mann (PSE) :
Robert Goebbels (PSE), Malcolm Harbour (PPE-DE), Alain Lamassoure (PPE-DE), Alexander Graf Lambsdorff (ALDE), Edit Herczog (PSE), Manuel Medina Ortega (PSE) et enfin Alexander Radwan (PPE-DE).
Les cinq autres, non membres du TPN étant : Carlo Fatuzzo (PPE-DE), Ieke van den Burg (PSE), Girts Valdis Kristovskis (UEN), Astrid Lulling (PPE-DE), et Struan Stevenson (PPE-DE).

Les 4 membres non parlementaires quant à eux sont : Graham Bishop (ancien Rapporteur du Groupe de pilotage interinstitutionnel de l’UE et actuellement conseiller d’European Financial Affairs), Christa Randzio-Plath (ancien président du comité des affaires économiques et monétaires du parlement européen et actuellement professeur à l’Université de Hambourg), Alexander Schaub (ancien Directeur Général au marché intérieur /Commission européenne) et enfin Robert Verrue (Directeur Général aux taxations/ Commission européenne).

 Les membres de ce bureau de direction représentant le secteur de l’entreprise sont :
Frédérique Biston (Volvo Group), Rainer W. Boden (Financial Services), Stephen Crisp (British Telecom), David Doyle (ACCA), Vianney Hennes (France Telecom), Joachim Hoenig (Deutsche Telekom), Jean-Claude Lahaut (CEFIC), Michael Langer (DIEHL VA Systeme), Silvia Matile-Steiner (Roche), Barbara Rapp (Kemmler Rapp Böhlke), Christopher Scott-Wilson (DIAGEO), Irène Svenson (SAAB), Ansgar Tietmeyer (Deutsche Bank), Michel Troubetzkoy (EADS) et Maurice Wagner (EUCOMED).
   
 Suit sur le site du Groupe Kangourou la liste des 56 entreprises membres (corporate members) parmi lesquelles nombre de poids lourds de l’économie mondiale, on citera : Astrazeneca, Dupont, Merck, Novartis, Pfizer, Sonafi Avantis, Deutsche Bank, Goldman Sachs, Dassault, EADS, Eurocopter, Saab, Thales, Bouygues, BT, France Telecom, Microsoft, Time Warner, Vodafone, Mars Uk, Phillip Morris, Seita Group, Chanel, l’Oréal, Unilever, British Petroleum Europe, Michelin ; tous dans la poche du petit Kangourou Européen.

Quand on est démocrate, et donc attaché à ce que les sphères politiques et économiques soient séparées, on se demande donc, ce que vont faire nos 14 députés européens dans cette galère ! Et sans que finalement personne ne s’en inquiète beaucoup. Suis-je de la planète Mars ? Même pas : Mars (Uk) est une des entreprises membre, adepte du Kangourou !

Enfin, il faut noter que le Groupe Kangourou compte également plusieurs membres honoraires, parmi lesquels : Valéry Giscard d’Estaing (Ex Président de la Convention européenne), d’Ana de Palacio (ex membre du praesidium de cette Convention, qu’elle a rejointe sur le tard et actuelle vice Présidente de la Banque Mondiale, entre autres…), de Mario Monti (Membre du bureau des dirigeants de Friends of Europe), tout comme Karel Van Miert (ex Vice Président de la Commission européenne en charge de la compétitivité, vice président de l’European Policy Centre, entre autres…). Tous encore adeptes du Kangourou et des méandres de sa poche.

Mais Erika Mann est également membre du Conseil consultatif de l’European Policy Centre, think tank des plus réputés à Bruxelles et dont 79 firmes sont membres, classées sur son site en quatre catégories, selon l’importance de leurs contribution, elles sont alors des membres de platine (10), des membres d’or (45), d’argent (4), ou de bronze (31), s’y retrouvent encore des poids lourds de l’économie mondiale dont je vous épargnerais la liste, tout en fournissant un lien avec la source d’origine en question (qui comprend aussi la totalité des membres de l’EPC pour 2008), prélevée sur leur site, pour ceux qui sont adeptes de ce genre de littérature.

Lien avec le liste des membres de l’EPC (sur leur site)

Il ressort donc de ce document que sont membres de l’European Policy Centre, classés en 10 catégories :

1) 79 firmes globales
2) 83 associations professionnelles et d’affaire qui représentent pratiquement tous les poids lourds du lobbying patronal international à Bruxelles.
3) 105 membres diplomatiques pour presque autant de pays de la planète
4) 29 fondations parmi lesquelles on trouve le Transatlantic Policy Network ( !)
5) 2 organisations gouvernementales.
6) 16 organisations inter-gouvernementales.
7) 45 ONG (organisations non-gouvernementales), dont certaines très prestigieuses.
8) 47 organismes régionaux et autorités locales
9) 6 organisations religieuses
10) 1 membre classé en catégorie  other / autre : Le Comité international de la Croix Rouge !

Soit une nouvelle forme de politique transnationale regroupant 413 organisations membres. Autant dire une structure qui mérite d’être pilotée par un directoire de haut niveau.

Le président actuel de l’EPC n’est autre que Peter Sutherland (voir global leaders) dont on rappellera que c’est entre autres le Président-Europe de la Trilateral Commission et du Transatlantic Policy Network. Ancien vice Président de la Commission européenne, ex directeur général du GATT, puis de l’OMC, homme de cette transition, il est aussi Chairman de Goldman Sachs et de British Petroleum Amoco, ainsi que vice Président de l’ERT (Table Ronde des industriels européens) où il y préside la commission des affaires étrangères.

Cette présidence est flanquée de deux vice-présidences assurées par :

John Kerr (Lord Kerr of Kinlochard) : Ancien Secrétaire général de la Convention européenne et actuellement gouverneur de la Ditchley Foundation, et de
- Karel Van Miert : Ex Vice président de la Commission Européenne en charge de la compétitivité, membre du bureau des dirigeants de Friends of Europe, membre du Conseil d’administration de Notre Europe, membre honoraire du Kangaroo group et ex Président de l’ Université de Nyenrode et ex Prés du Parti Socialiste Belge. Il est par ailleurs administrateur d’ AGFA Gevaert et de De Persgroep et membre du conseil de surveillance de  Philips, Walters Kluwer, Goldman Sachs, Rabobank, DHV, Guidant, Eli Lilly, British American Tabacco, ainsi qu’au Conseil consultatif  international de RWE.

Le Bureau de gouvernance, composé de sept membres est lui présidé par :

Antonio Vitorino : Membre du Praesidium de Friends of Europe et ex membre du Praesidium de la Convention européenne puis membre de l’ACED/groupe Amato, ex Commissaire européen à la justice et aux affaires intérieures, il est aussi administrateur du Centre for European Reform et de l’European Council on Foreign Relations. Il a été aussi V. Prés. de Portugal Telecom International et ex Prés de l’assemblée générale des actionnaires de la Banco Santander Central. Il est aussi un ancien 1er Ministre du Portugal.  

Le Conseil Consultatif international, présidé par P. Sutherland et ses deux vice Présidents est lui composé de 60 membres qui représentent l’élite décisive de l’influence, de l’expertise européenne et du monde de l’entreprise. On y (re)trouve, outre les personnalités susnommées ainsi qu’Erika Mann :
Qavid Arkless (Manpower), Stephen Badger (Mars), Hans Blix (Président de la Weapons on Mass Destruction Commission), Jocelyne Cesari (Harvard University), Vladimir Chizhov (Ambassadeur de la représentation permanente Russe/UE), Philippe de Buck (Secrétaire Général de BusinessEurope/Confédération européenne des syndicats patronaux), Philippe de Shouteete de Tervarent (FoE, représentant permanent de la Belgique/UE), Gareth Evans (Président de l’International Crisis Group), Stephane Ducable (Microsoft), Alan Dukes (Institute of European Affairs), Piero Gastaldo (Compagnia di San Paolo/partenaire EPC), Paul Gillespie (The Irish Times), Sylvie Goulard (Mouvement Européen France),
Ross Hornby (Ambassadeur du Canada/UE), Hywel Ceri Jones (European Network Foundations), Craig Kennedy (German Marshall fund of the United States), Rory Mac Millian (Nike), John Monks (ETUC/CES, Confédération Européenne des syndicats), Nobutake Odano (Ambassadeur Japon/UE), Wim Philippa (ERT), Poul Nyrup Rasmussen (Parti Socialiste Européen/PSE), Scott C. Ratzan (Johnson & Johnson), Gahëtane Ricard-Nihoul (Notre Europe), Eberhardt Sandschneider (German European Council on Foreign Relations), André Sapir (Bruegel), Jamie Shea (OTAN), Jacek Saryusz-Wolski ( Président de la commission des affaires étrangères au Parlement Européen, TPN et FoE), David Sieff (Mark & Spencer), Marc Spelman (Accenture), Miguel Veiga-Pestana (Unilever), Helen Walace (London School of Economics/LSE) et Graham Watson (Alliance des Libéraux et Démocrates du Parlement Européen).  

On aura remarqué par ailleurs que toutes les personnalités composant ce Conseil Consultatif International sont toutes de haut niveau de direction dans toutes les organisations et entreprises qu’ils représentent. Ce qui à mon sens veut dire deux choses : tout d’abord que les activités de l’EPC sont d’une nature telle qu’elles attirent à lui les dirigeants de ces organisation et entreprises au point qu’ils trouvent le temps de s’y investir et de cautionner son action et qu’ensuite l’EPC dispose ainsi d’un haut niveau d’expertise et de conseil sur fond de débat politique, puisque –et je le fais ici encore remarquer– on trouve des sensibilités de Droite comme de Gauche socialiste dans ce conseil. Comment analyser cela ?

Une réflexion sommaire, mais répandue, pourrait ne voir dans cet aréopage que la signature d’une sorte de « complot libéral » associant ultra/néolibéraux et libéraux-socialistes « vendus » aux exégètes du marché. La réalité me semble encore une fois un peu plus complexe et repose à la fois sur l’ «effet de creuset» que représentent ces sortes de réseaux d’influence quant à la construction progressive d’une sorte d’idéologie du réalisme et du pragmatisme économique ou libéralisme économique et socialisme se confondent.
Inachevé

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La suite est à pourvoir, elle concernera les points suivants :

2) Des compétences politiques nationales de haut niveau
3) Des compétences politiques dans les institutions européennes
4) Des compétences dans le monde de la grande entreprise globale                    
5) Des compétences et des rôles décisifs dans les réseaux d’influence
6) Des fonctions marginales dans les organes de presse.  
               

 

NOTE : Les quatre dimensions d’un réseau d’influence :

1) L’attraction : capacité à attirer les meilleurs, variable de l’ouverture à la fermeture politique.
     a) Attraction ouverte : experts et élites de sensibilité politiques différentes
     b) Attraction fermée ou concentrée : experts et élites d’une sensibilité donnée
         Attraction généraliste ou spécialiste (lobbies)
                                                                                                        
2) L’élaboration / capacité à élaborer un travail d’analyse et à concevoir des stratégies de diffusion.
     a) La mission /objet
     b) La stratégie : réalisation de l’objectif
        
3) Le rayonnement / réputation
       a) Les modes et capacités d’actions, débats, publics, harcèlement, contacts perso, évènements

4) La réticularité : Capacité d’une organisation à s’organiser en réseaux

 

Chutes, repérages de travail

P. Cox : Mouvement européen
Peter Mandelson :
J. Solana : Haut resp aff étrg. + Secrétaire général du Conseil

E. Brok & Saryusz-Wolski :Transatl Législator’s Dialogue
J. Monks : Prés Conf Europ des Syndicats
E. Mann : EPC et Kg. group

        
a) dans le domaine des réseaux d’influence :
Etienne Davignon est Président du très élitiste Groupe de Bilderberg, organisation très discrète, créée en 1954,  dont la seule activité connue (pas de site internet) est  la convocation  
CEPS ERT AUME
P. Lamy : OMC
D. Janssen :Trilatérale
P. Cox : Mouvement européen
Peter Mandelson :
J. Solana : Haut resp aff étrg. + Secrétaire général du Conseil
E. Brok & Saryusz-Wolski :Transatl Législator’s Dialogue
J. Monks : Prés Conf Europ des Syndicats
E. Mann : EPC et Kg. group

1) Ayant occupé des postes politiques-clé :
1 Ex Président d’Etat : V. Landsbergis (Lithuanie)
6 ex 1er Ministres : G. Amato, C. Bildt, J. Bruton, J.L. Dehaène, W. Kok et M. Rocard.
4 ex Ministres des affaires étrangères : M. Barnier, H. Christophersen, U. Ellemann Jensen et J. Solana.
  Fonctions relatives à ce type de secteur : L. de Palacio ( Présidente de la Commission des affaires étrangères du Parti Polpulaire espagnol)
                                                                       M. Saryusz Wolski : Ex Ministre des affaires européenne de Pologne.
                                                                       E. Guigou : Ex Vice Présidente de la délégation de l’Assemblée Nationale auprès de l’Union Européenne
2 ex Ministres des finances : E. Alphandéry et H. Christophersen.
         Gouverneur Banque de Finlande : E. Liikanen

2) Processus de Traité européen.
6 membres du Praesidium de la Convention (50%), dont les deux vice président  + invité spécial
6 mbr de l’ACED

3) Institutions européennes :

Conseil et PESC :
Le Secrétaire Général du Conseil et Haut Responsable de la politique étrangère de Sécurité Commune (PESC) : J. Solana

 4 ex Vice Présidents Commission européenne : E. Davignon, E. Christophersen, L. de Palacio et K. Van Miert.

 13 Commissaires ou ex dont 3 en exercice : E. Davignon (Indus, rech, énergie), Pascal Lamy (Com. internat) , A. Vitorino (justice), M. Barnier (Réformes instit. Et Règlement.), E. Christophersen ( ???) , L. de Palacio ( ???), A. Diamantopoulou (Emploi et aff. Sociales), F. Fischler (Agr & pêche), S. Kalniete (Agr. & Pêche), E. Liikanen (Indus.), P. Mandelson (Com. internat.), M. Monti (Compétitivité), K. Van Miert (Compétitivité).

  5 Directeurs de com. : P. Cecchini (Marché intérieur), H.G. Krenzler ( Relat. Estérieures), E. Micossi  et R. Perrissich ( Indus) et E. Rhein (Commerce méditerranéen)
 
 2 chefs de Délégation EU/UE : J. Bruton et G. Burghardt (à vérifier)  
 
2 ex Président du Parlement Européen et 1 ex vice Prés. (dont 2 TPN) : Pat Cox, E. Baron Crespo, et 1 ex V. prés.: J. Saryusz Wolski
11 députés européens en exercice, dont 7 du TPN
TPN : E. Baron Crespo, J.L. Bourlanges, E. Brok, T.H. Ilves, E. Mann, M. Rocard et D. Sterckx
    Et V. Landsbergis, A. Peterle, M. Frassoni et J. Saryusz Wolski.(mais TPN à partir de 2007)

                    3 CA du TPN : C. Bildt, G. Burghardt et E. Liikanen : TPN : + de 20% CA de FoE

4) Journalistes : M.A. Aguilar : El Païs, F. Lemaître : Le Monde, Giles Merritt : Financial Times & Herald Tribune

5) Réseaux d’influence:

Bilderberg Group : Son Prés : E. Davignon (AUME/ERT)
Co Trilatérale : D. Janssen (Comité exécutif)  et P. Revay (Dir. Europe (???)) + lien par TPN >Sutherland
CFR : C. Bildt

ECFR : 7 membres dont 3 de la présidence de Foe : E Davignon, JL Dehaene, P. Lamy + G. Amato, J. Bruton, U Ellemann Jensen, Antonio Vitorino,

ERT: Ex prés: Davignon et ex secr gén : K Richardson + D. Janssen (membre ERT)

TPN : 8/9 députés + 3 CA = 20 %
EPC (13) : 6 : Ses 2 v. Prés : A. Vitorino et K. van Miert. 4 ad : Ph. De Sh. De Tervarent, E. Liikanen, E. Mann, et J. Monks
                  7 : Ex mbr : 3 députés tous du TPN : E. Baron Crespo, J.L. Bourlanges, E. Brok
                                  + L. Brinkhorst, H. Christophersen, E. Guigou et Ph. Lemaître.

Ditchley Found (4): G. Amato, J. Bruton, P. Mandelson et J. Monks + E. Davignon
CEPS (3): V. Prés E. Davignon + Ph de Sh. De Tervarent et S. Micossi (Ad)
Aspen (3): G. Amato, M. Barnier, M. Monti
KG Group (3): E. Mann et 2 mbr honoraires : K. van Miert et M. Monti
CER (4) : P. Lamy, A. Vitorino, C. Bildt et J. Monks

Notre Europe (5) : Pascal Lamy, J.L Bourlanges, E. Guigou, Ph. De Shouteete de Tervarent, K. van Miert.

Mouvement Européen (2): Son Président : Pat Cox (mbre du Praesidium) et J. Monks
                                         - Sylvie Goulard Prés FR du ME (Prof à Sc. Po.) est Ad. de l’EPC -

 

Entreprises :

Les 56 membres de ce directoire croisent ou ont croisé les intérêts de près de 65 sociétés et firmes globales en y exerçant ou en y ayant exercé des fonctions de présidence, de direction, d’administration ou de surveillance.
Davignon : 14 sociétés à lui seul !     Jeu des « portes à tambour » Instit UE et privé    Renvois d’ascenseurs ?

 

 Friends of Europe mémo incomplet

                   - 40 global firms de la Triade, (Exxon Mobil, BP, Cargill, Novartis, Unilever, Volvo, Toyota, Sony, IBM, Intel, Microsoft, Coca Cola, …) mais aussi quelques ONG  faire-valoir, comme le WWF membre également de l’European Policy Centre. 
                - 33 parlementaires, commissaires et fonctionnaires de l’UE, ou ex.
                - 21 ex responsables politiques nationaux de haut niveau exécutif
                - Le dir. gén. de l’OMC, le Secrétaire Général de la CES
                - Un tissu de réseaux d’influence, qui bénéficie officiellement du soutien de la Commission Européenne.